Fonction d’investissement à échelle humaine basée sur l’équivalence des besoins et des capacités
Si l’on ne prenait comme référence économique, financière et comptable que les situations humaines et pas les situations matérielles, nous serions tous très riches. La raison est que contrairement aux choses, les êtres humains ont des besoins et des capacités, deux forces qu’ils peuvent relier de façon contradictoire pour produire une dynamique évolutive.
Le point de départ d’une économie conjonctive est la formule permettant de nous faire passer dans une économie du développement humain qui ne serait plus seulement une économie des choses.
Besoins = Capacités
Cette formule considère l’unité indissoluble des besoins et des capacités, ce qui amène à les comprendre comme un tout qualitatif et à les gérer comme deux valeurs fondamentalement complémentaires.
Besoins ≠Capacités
La seconde formule considère que les besoins et les capacités constituent deux parties séparées. Cela revient à dire que les rapports entre besoins et capacités sont fondamentalement inégaux.
Dans le modèle conjonctif, l’économie est vue comme une intégration ou une symbiose des besoins et des apacités humaines obtenue par une expression mathématique juste. Cette approche ne cherche pas simplement à mesurer et quantifier de manière isolée, mais à comprendre les besoins et les capacités comme des éléments interdépendants qui doivent être équilibrés. La formule “Besoins = Capacités” illustre cette vision, suggérant que l’optimalité économique est atteinte lorsque les capacités répondent précisément aux besoins, formant une unité indissoluble.
À l’opposé, l’économie disjonctive considère les besoins et les capacités comme des entités séparées voire comme des grandeurs incommensurables, le plus souvent en tension ou en compétition. Cette approche, représentée par la formule “Besoins ≠ Capacités”, perçoit les relations économiques sous l’angle des différences et des déséquilibres, conduisant à une gestion qui met l’accent sur les écarts plutôt que sur l’intégration. Dans une telle approche, l’optimalité économique est atteinte quand chaque agent profite au maximum d’une capacité pour satisfaire son besoin, ou quand il profite au maximum de certains besoins afin de maximiser une capacité.
Ces deux formules liminaires sont suffisantes pour spécifier ce que nous appelons une économie de la conjonction qui cherche à unir les valeurs différentes par une logique de contradiction dans une approche humaniste basée sur le tiers inclus, et une économie de la disjonction qui cherche à séparer les valeurs différentes par une logique discriminante basée sur les quantités, les comparaisons, et le réflexe identitaire du tiers exclu.
La représentation comptable de l’économie disjonctive
Le problème dont souffre toute l’économie disjonctive à notre époque pourrait se résumer à la contradiction qui existe entre les valeurs explicites du développement durable qui sont prônées par une majorité de personnes et les normes implicites des outils de comptabilisation de la richesse. Le problème fondamental part du constat que dans un système comptable basé sur la disjonction, la monnaie ne mesure que les quantités mais elle ne mesure pas les valeurs. La première difficulté vient du mode d’émission de la monnaie elle-même qui constitue une fin en soi totalement décorrélée des besoins et des capacités. Cette décorrélation (ou virtualisation) des unités de compte explique que le seul mode d’émission monétaire soit autoritaire, centralisé, opaque et basé exclusivement sur de la dette.
Toutefois il s’agit de comprendre que le problème de l’émission monétaire n’est qu’une petite partie d’un problème plus global provenant de la disjonction que nous opérons dans la gestion de toutes nos valeurs. Parce qu’elle fonctionne systématiquement sur le principe de l’opposition de toutes les valeurs, la comptabilité possède un caractère disjonctif : les opérations de crédit et de débit y sont traitées comme des éléments exclusifs. Cela signifie que chaque opération est soit un gain, soit une perte, soit une recette, soit une dépense, soit un revenu, soit une charge, soit un crédit, soit un débit, mais elle ne peut pas être les deux à la fois.
La disjonction est arithmétiquement irréprochable, mais elle peut simplifier excessivement la réalité complexe des échanges humains et ignorer leurs effets combinés. Le système comptable de nature disjonctive se reflète dans la monnaie de l’économie libérale de marché : celle-ci permet d’acheter OU de vendre, de faire des recettes OU des dépenses, de produire un revenu OU une charge, d’être en situation de crédit OU de débit. On pourrait donc parler à son sujet d’une monnaie unilatérale de nature disjonctive qui se consomme au premier usage (bien fongible).
Cette nature disjonctive explique que le comportement d’une majorité de personnes consiste à nous solliciter, soit pour nous vendre quelque chose, soit pour que nous leur donnions de l’argent. Dans les deux cas, la monnaie est recherchée comme une valeur en soi car elle représente un pouvoir d’achat. La monnaie permet de recevoir quelque chose sans rien devoir donner en échange (à part de l’argent qui dans bien des cas n’a aucune valeur intrinsèque sinon celle d’un titre de dette gagée sur rien). On peut donc dire que la monnaie du libéralisme produit une transaction sans aucune réciprocité. Cela pose la question de savoir dans quelles conditions la monnaie pourrait devenir l’instrument de la réciprocité.
Les conséquences de cette approche disjonctive des échanges économiques et financiers est perceptible à de multiples niveaux qu’il est intéressant de décrire pour favoriser une prise de conscience salutaire :
Nature exclusive des opérations :
Dans un système comptable basé sur la disjonction, les opérations de crédit et de débit sont traitées comme des éléments mutuellement exclusifs, séparés, opposés et dotés d’une existence propre. Cela signifie que chaque opération est soit un gain, soit une perte, soit une recette, soit une dépense, soit une créance, soit une dette, mais elle ne peut pas être les deux à la fois. Cette séparation est pratique en termes de présentation et de compréhension, mais elle peut simplifier excessivement la réalité complexe des échanges humains et de leurs effets combinés.
Absence de complémentarité :
Cette approche ne prend pas en compte la possibilité que certaines dépenses (débits) puissent en réalité être des investissements qui génèrent de la valeur à long terme. De même, certains revenus (crédits) peuvent avoir des coûts cachés ou des conséquences à long terme qui ne sont pas immédiatement apparents mais qui le deviendront dans un avenir certain. La disjonction comptable limite donc la capacité à percevoir l’ensemble des grandeurs économiques telles que recettes et dépenses, créances et dettes, tarification et monétisation, et la principale qui les synthétise toutes, besoins et capacités, comme des grandeurs complémentaires.
Évaluation limitée de la valeur réelle :
La disjonction comptable, dans son souci de séparer les débits des crédits, manque souvent de nuances dans l’évaluation de la “valeur”. Par exemple, comment évaluer la “valeur” d’une action écologique ou sociale durable, mais non rentable à court terme ? Dans un système comptable disjonctif, elle est simplement classée comme une dépense, sans égard pour son potentiel de valeur à long terme ni pour son impact positif ou négatif sur les membres du corps social ainsi que sur les milieux naturels et culturels.
Confusion entre profit et le bénéfice réel :
Dans un système comptable basé sur la disjonction, la monnaie mesure le bénéfice d’une activité en fonction de la différence entre ses recettes et ses charges, ce qui conduit un tel système comptable à valoriser et soutenir les activités qui font le plus de profit et à considérer négativement les activités qui ne font aucun profit. Ainsi dans un tel système de représentation comptable, la vente de contenu pornographique est des milliards de fois plus valorisée que la réalisation du 5ème ODD sur l’égalité des hommes et des femmes qui continue d’être traité comptablement comme une charge.
Focus sur le solde comptable des opérations :
La disjonction comptable est incapable de gérer synchroniquement des valeurs positives et négatives autour d’un centre neutre. Elle est toujours obligée de compenser les valeurs positives ou négatives en les réduisant à leur solde, ce qui pour effet de les annuler et de les désactiver. Cela crée une situation où les activités sont évaluées principalement sur leur capacité à générer un solde positif et à être rentables, plutôt que sur un équilibre dynamique basé sur leur valeur intrinsèque. La destruction programmée des systèmes de santé qui sont perçus comme des charges qu’il faudrait constamment réduire au moyen de restrictions budgétaires pour obtenir le label de la bonne gestion des fonds publics est la conséquence directe de la recherche de l’équilibre comptable au moyen du solde zéro.
Absurdité des nomenclatures comptables :
La difficulté à s’engager dans une économie de transition ne provient pas seulement de notre courbe de croissance ou de consommation, mais d’un mode de représentation comptable qui conduit à percevoir positivement, c’est-à-dire comme des gains, tout ce qui contribue à la dégradation accélérée des tissus sociaux et écologiques, et à percevoir négativement, c’est-à-dire comme des charges, à peu près tout ce qui fonde la vie en société et permet l’entretien des dimensions constitutives de l’existence humaine. Tant au niveau de nos valeurs que de nos activités, le maintien de ce mode de représentation comptable des opérations est un non-sens qui réduit toutes formes de richesses aux seuls critères de la solvabilité et de la rentabilité et produit beaucoup de souffrances dans le monde.
Le paradoxe du traitement de la valeur est résumé dans ce tableau des 17 objectifs de développement durable dont la valeur négative de « dépenses » et de « charges » doit être mise en corrélation avec la valeur positive de ce que la comptabilité disjonctive considère comme un « gain » et une « recette ». C’est cette question du traitement comptable des activités valorisées positivement et négativement qui nous semble de loin la donnée la plus importante. Pourtant de nos jours, la quasi-totalité des combats pour la justice sociale se focalisent uniquement sur la répartition entre les masses monétaires. Celle-ci se fonde sur le rapport entre quatre groupes socio-économiques : les Etats dont la somme totale des PIB représente environ 100.000 milliards de dollars en 2023, la richesse privée mondiale estimée à environ 454.400 milliards de dollars en 2023, et parmi eux la richesse contrôlée par les millionnaires (1,1% de la population mondiale), estimée à 208.300 milliards de dollars. Enfin, environ 659 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté extrême avec moins de 2,15 dollars par jour. Cela représente environ 8,5 % de la population mondiale.
Dans la comptabilité en partie simple, on distingue un état d’entrée (que l’on appelle un revenu ou une recette), un état de sortie (que l’on appelle une dépense ou une charge) et un solde (qui désigne le flux net de trésorerie ou différence entre les entrées et les sorties et qui peut être positif, négatif ou nul). Dans la comptabilité en partie double de résultat, on distingue un état de revenus (ou produits), un état de dépenses (ou charges) et un troisième état qui résulte de la différence entre les revenus et les dépenses que l’on appellera un bénéfice (situation excédentaire) ou une perte (situation déficitaire) ou un équilibre (résultat net égal à zéro). Dans la comptabilité en partie double de bilan, on distingue un état des ressources (que l’on appelle les actifs), un état des engagements (que l’on appelle les passifs), et un troisième état des capitaux propres qui désigne la valeur résiduelle des actifs de l’entreprise après déduction de tous ses passifs et permet de vérifier l’équation « Actifs — (Passifs + Capitaux propres) = 0 ». Ces trois types de comptabilités d’inspiration très financière sont aujourd’hui la norme pour le traitement de la valeur dans tous les échanges mondiaux.
Ainsi nous voyons bien que les caractéristiques structurales de la comptabilité sont celles que lui donne l’utilisation de l’opération mathématique de l’addition inversée : elle fonctionne à partir de valeurs chiffrées opposées de façon systématique (notamment dans la comptabilité en partie double) dont l’évaluation repose toujours sur des différences et dont le centre de gravité est toujours la valeur zéro. Ce mode de représentation comptable explique mathématiquement plus encore que normativement pourquoi la monnaie est créé ex-nihilo par les banques commerciales et pourquoi elle ne peut produire que de la dette.
Sans remettre réellement en cause le fonctionnement mathématique des systèmes comptables disjonctifs, les tentatives qui ont été faites ces dernières années pour remédier au problème de la décorrélation des quantités et des valeurs ont consisté à rajouter un quatrième état qui essaie d’introduire “la valeur réelle” dans la comptabilité analytique.
Dans le contexte de la comptabilité actuelle :
1. Comptabilité en partie simple : Le quatrième état consiste en une mesure de la « valeur ajoutée » et du « bénéfice réel » de chaque transaction, qui va au-delà de la simple mesure du flux monétaire.
2. Comptabilité en partie double de résultat : En plus des états de revenus et de dépenses et de leur différence (bénéfice ou perte), le quatrième état est celui qui prend en compte les « coûts réels », c’est à dire les “externalités” positives ou négatives générées par l’entreprise qui demeurent assez difficiles à évaluer.
3. Comptabilité en partie double de bilan : En plus des actifs, des passifs et des capitaux propres, le quatrième état qui a été proposé dans les programmes RSE représente la “valeur sociale et environnementale” de l’entreprise, qui se présente comme une récompense financière des engagements sociaux et environnementaux qui produisent une survaleur au niveau de certains actifs intangibles comme la marque, l’image, la culture sociale et managériale.
Nous pensons que ces initiatives méritantes mais insuffisantes ne sont pas capables de produire le résultat attendu car elles ne remettent pas en cause nos modes positifs et négatifs de classification des valeurs. C’est la raison pour laquelle nous devons revenir à la distinction première entre économie disjonctive et conjonctive qui nous permettra de mener une réflexion sur nos modes de représentation de la valeur. En effet, si chacun sait que la monnaie est définie depuis Aristote comme un instrument de mesure économique de la valeur, on oublie que cela implique que la monnaie soit définie politiquement comme un mode de représentation de la valeur.
La comptabilité financière basée sur les créances et les dettes, les gains et les pertes nous a toujours raconté que les valeurs devaient se définir au moyen de nombres positifs ou négatifs fonctionnant selon la règle de l’addition inversée. Mais cette règle de calcul qui part du postulat de la séparation de toutes les valeurs et de l’exclusion du tiers est-elle la seule envisageable, ou pourrait-on calculer pour corréler autrement ? S’il existe des règles de calcul alternatives, quels en seraient les principes et les bénéfices attendus ? Enfin, pourrait-on espérer une amélioration globale et une meilleure prise en compte du nécessaire équilibre des dimensions économiques, sociales et écologiques si nous remettions en cause le postulat de la séparation qui fonde nos représentations comptables ?
Les tiers-inclus de l’économie conjonctive
Le concept de tiers inclus dans une économie conjonctive inspirée de la philosophie du Tao repose sur l’idée que toutes les grandeurs économiques et financières sont intrinsèquement complémentaires, formant un tout harmonieux et interdépendant. Contrairement à la logique classique du tiers exclu, où une proposition et son contraire ne peuvent pas coexister, l’économie conjonctive intègre les opposés dans une dynamique de complémentarité et d’équilibre. Cela signifie que des éléments apparemment contradictoires, tels que l’offre et la demande, la consommation et l’épargne, ou même la dette et la créance, ne sont pas perçus comme des forces opposées mais comme des facettes d’une même réalité économique. Chaque grandeur économique n’existe et n’a de sens que par rapport à ses contraires, et c’est cette interaction constante qui crée la stabilité et la prospérité du système. Ainsi, dans cette vision taoïste, la monnaie n’est pas simplement un moyen d’échange ou une réserve de valeur, mais un lien dynamique qui relie toutes les composantes de l’économie dans une unité cohérente. En reconnaissant et en valorisant la complémentarité de toutes les grandeurs économiques, cette approche favorise une compréhension plus profonde des interconnexions économiques et permet de concevoir des politiques et des stratégies qui équilibrent harmonieusement les différentes forces en jeu.
Le concept du « tiers inclus » est une approche philosophique qui énonce que lorsque nous sommes devant deux forces ou deux réalités ou deux tendances opposées, il existe toujours une troisième possibilité qui émerge de la conjonction des deux premières. Cette fonction contradictoire et réconciliatrice suggère une forme d’unité au-delà de la dualité qui se manifeste dans une structure trinifiée ou une balance ternaire capables de créer une relation de complémentarité entre deux valeurs ou deux catégories qui se trouvent dans un rapport d’exclusion mutuelle. Dans le Tao Te King de Lao Tseu, plusieurs versets illustrent cette idée, car c’est la raison d’être du Tao que d’embrasser et transcender les dualités. Un verset particulièrement évocateur de ce principe est le chapitre 40, qui dit : « Le retour est le mouvement du Tao. Céder est la voie du Tao. Toutes choses naissent de l’être. Et l’être naît du non-être. » Ce verset peut être interprété comme illustrant le principe du tiers inclus, en montrant comment l’existence et la non-existence ne sont pas simplement opposées mais profondément interdépendantes, avec le « non-être » (ou le vide) comme fondement invisible et nécessaire pour « l’être » (ou le plein). Cette interrelation suggère une synthèse ou une intégration contradictoire qui va au-delà du principe de la non-contradiction des valeurs opposées.
De la même façon, on peut affirmer que la monnaie est un instrument d’échange universel car elle joue le rôle de tiers inclus parmi l’ensemble des produits et des services dont elle sert à mesurer la valeur. Ce fut un coup de force de la pensée que d’arriver à créer cette mesure numérique : on a dû d’abord comparer les produits, les services, les évaluer l’un par l’autre comme dans le troc, autrement dit confronter chaque objet avec son autre, son vis-à-vis, jusqu’à arriver à la confrontation de tous avec une image abstraite qui sert de tiers inclus : l’ensemble de nombres. Voilà pourquoi on peut définir la monnaie comme un langage chiffré, ou plus exactement comme une proposition de valeur régie par la logique contradictoire du tiers inclus qui projette tout geste humain nommable et identifiable sur l’ensemble des nombres. La dynamique monétaire pourrait être décrite comme un ensemble de fonctions, de fonctions numériques, qui « traduisent » ou « convertissent » l’action humaine en nombres réels. La monnaie fonctionne comme un équivalent universel en fournissant une échelle de valeur commune à tous les biens et services les plus variés.
C’est en raison de son rôle de tiers inclus que la monnaie agit comme un intermédiaire universel, facilitant les échanges en dépassant les limites du troc où les biens doivent être échangés directement. Dans le troc, chaque produit ou service est évalué directement contre un autre, ce qui nécessite un alignement permanent des besoins entre les parties. La monnaie élimine cette difficulté en introduisant un tiers élément — un nombre — qui possède une valeur acceptée universellement. Ainsi, elle permet une infinité de transactions sans nécessiter une correspondance directe des besoins entre les vendeurs et les acheteurs. L’abstraction de la monnaie, similaire au concept du “non-être” dans le Tao Te King, est ce qui permet à “l’être” — dans ce cas, les biens et services tangibles — de se manifester et de circuler dans l’économie. Cette abstraction n’existe pas dans un vide mais est intrinsèquement liée à la réalité tangible qu’elle aide à se constituer. Ainsi, la monnaie crée une nouvelle réalité où les échanges peuvent se produire sans demander une correspondance immédiate des besoins. Elle est un facteur de conjonction reflétant le principe du tiers inclus.
L’erreur que font les économistes à notre époque est de croire que les unités de compte monétaires constituent la forme achevée du processus historique de construction de l’économie monétaire. Celle-ci serait le produit d’une évolution ayant permis à l’humanité de quitter le troc pour accéder à une forme d’échange plus complexe dans laquelle la monnaie tient un rôle central et déterminant. En tant qu’équivalent universel, la monnaie représente un consensus collectif sur la valeur, fonctionnant comme une norme acceptée pour l’évaluation de toutes les formes de richesse. Ce rôle unificateur permet aux différentes formes de capital (humain, physique, intellectuel) d’être évaluées sur une échelle commune, facilitant une diversité d’activités économiques et d’innovations. Cependant, des siècles de pratique économique semblent nous montrer que nous ne sommes qu’à la première étape du long processus historique de monétisation de nos économies, car ce qui se joue ici, ce ne sont pas des masses monétaires de plus en plus importantes à injecter dans les circuits économiques et financiers, mais ce sont les progrès de notre conscience monétaire visant à introduire la pensée contradictoire du tiers inclus dans l’ensemble du système de production et d’échange pour plus de justice sociale.
Puisque tout ce qui s’apparente à une disjonction économique, sociale, écologique, comptable ou financière provient d’une insuffisance de la pensée monétaire que nous assimilons à un attachement au postulat de séparation des objets et des sujets basée sur la logique non-contradictoire du tiers exclu, nous sommes invités à progresser dans nos pratiques monétaires en découvrant de nouvelles formes de pratiques économiques et sociales conjonctives plus justes basées sur la logique du tiers inclus.
Dans la perspective de cette approche évolutive, nous allons énoncer quatre domaines ou quatre chantiers dans lesquels l’introduction de la logique du tiers inclus peut révolutionner les usages de la monnaie :
Choix d’une unité de mesure chiffrée
Imaginons qu’un bien soit choisi comme étalon de valeur pour mesurer tous les autres biens et qu’il soit également utilisé comme moyen d’échange pour acheter ces biens. C’est ainsi que sont apparues historiquement les premières formes de monnaie. Supposons maintenant que ce bien n’ait plus de valeur ou d’utilité propre, à part celle de servir d’unité de compte. Il permettrait ainsi de créer une fonction qui associe à chaque objet, projet ou action noté x, un nombre précis, noté f(x). Réciproquement, cette fonction monétaire associerait un nombre f(x) à chaque x (objet, projet ou action), établissant une correspondance claire et systématique.
La monnaie fonctionne comme un langage chiffré, où les nombres jouent le rôle de symboles pour exprimer la valeur. Ces nombres permettent de réaliser des transactions complexes de manière simple et standardisée. Dans cette perspective, le nombre joue le rôle d’intermédiaire dans toutes les formes d’échanges. Hormis la question du chiffrage, on lui associe des signes arithmétiques pour lui conférer une signification : si la valeur est négative, c’est une dette, et si elle est positive, c’est une créance ou une disponibilité. Dans les balances comptables qui servent à enregistrer les transactions, créances et dettes sont traitées de manière séparée au moyen de l’addition inversée C + D = 0, et cette caractéristique opératoire façonne toutes nos pratiques économiques autour de la notion de dette monétaire.
Choix d’une unité de valeur commune
Imaginons qu’à la place de l’accumulation arithmétique des unités de compte monétaires, une personne décide de mettre en partage une unité de base monétaire pour permettre à chacun de l’utiliser librement selon son potentiel de production et d’échange. Grâce à cet usufruit monétaire simultané et universel, chaque personne serait en mesure de créer son propre espace monétaire basé sur l’équipotentialité des créances et des dettes, des besoins et des capacités, des ressources et des emplois, des coûts et des prix, qui se relativiseraient et se neutraliseraient par l’intermédiaire de l’unité de valeur partagée qui jouerait le rôle de tiers inclus.
A ce second niveau, la monnaie est une fonction de calcul que l’on représente par la fonction d’involution f(e) -> e : En mathématiques, une involution est une application bijective qui est sa propre réciproque, c’est-à-dire par laquelle chaque élément est l’image de son image. C’est le cas par exemple du changement de signe dans l’ensemble des nombres réels, des projections et des transformations vectorielles, ou des symétries du plan ou de l’espace en géométrie euclidienne. En algèbre linéaire, les endomorphismes involutifs sont d’ailleurs appelés symétries. Dans le cas de la gestion financière, le multiple infiniment petit de l’unité (le besoin) et son inverse (la capacité) se relient dans la multiplication inversée C * D = 1 afin de constituer un champ monétaire trinifié et partant de là unifié.
Choix d’un livre de compte planétaire
Imaginons qu’avec les nouvelles technologies de paiement décentralisé, le système d’enregistrement comptable des opérations ne repose plus sur un grand livre de compte propre à chaque organisation économique particulière, mais sur un très grand livre de compte universel fonctionnant comme le support unitaire pour toutes les opérations. On pourrait facilement concevoir que ce grand livre de compte unitaire fonctionne comme un registre électronique distribué de la taille de la planète terre, et qu’il soit un facteur d’unification des organisations économiques et sociales à une échelle trans-étatique. Vis-à-vis de tous les documents comptables privés et confidentiels, ce grand livre de compte public et transparent jouerait le rôle de tiers inclus dans la mesure où c’est par lui que transiteraient tous les échanges de réciprocités basés non sur une compétition quantitative mais sur une coopération structurale.
A ce quatrième niveau, la monnaie est de nouveau une fonction de comptage, mais il s’agit cette fois d’un comptage basé sur une recherche de valeurs que l’on veut réaliser en commun. La structure de comptabilisation devient ternaire dès lors qu’elle priorise la visibilité des opérations comme condition absolue de réalisation de valeurs capables de promouvoir le bien-être économique, écologique et social. La visibilité des données comptables, économiques et financière joue le rôle de tiers inclus car elle est susceptible de mettre un terme à toutes les formes de fraudes et de corruptions basées sur le secret des affaires, mais cela suppose également que les transactions dont procèdent ces données changent de nature et que ses utilisateurs soient réellement désireux d’établir entre eux des rapports de réciprocité qui ne se limiteraient plus à de simple échanges mercantiles. Dans la visibilité des échanges se joue la question du statut social et de la réputation dont sont issus les sentiments sociaux de la confiance, de la justice, de la responsabilité, de l’espérance et du bonheur partagés.
Choix d’une procédure de coordination
Imaginons qu’en remplacement du mécanisme de coordination du marché basé sur les rapports de force issus de l’offre de marchandises et de la demande solvable, on propose un mécanisme de consensus collectif basé sur le vote de préférence permettant à chaque agent de voter en classant différentes priorités par ordre de préférence. En donnant à chaque personne physique ou morale, privée ou publique la faculté de participer à une décision collective visant à évaluer la priorité des projets et des produits, des besoins et des capacités à réaliser, le vote de préférence rend possible la pratique d’une création monétaire réflexive basée sur la monétisation directe des besoins et des capacités. Cette réflexivité du vote basée sur l’expression des préférences collectives permettra le cas échéant à un groupe de se doter des moyens financiers pour la réalisation de ses valeurs en décidant ensemble d’un agenda de réalisation. Comme tout ce qui compte dans la vie des hommes et donne lieu à l’expression du nombre relève soit du temps soit de l’argent, on comprend aisément le rôle central et créatif que pourrait avoir une procédure de vote de préférence pour la sélection des propositions de valeurs liées à la fonction d’utilité sociale.
Dans une telle perspective, la monnaie est le tiers inclus du vote de préférence car il est tout à fait possible de voter et de procéder à des évaluations en distribuant des valeurs ou des points monétaires. Inversement, on peut dire que le vote de préférence est le tiers inclus des espaces monétaires car il permet de déterminer les budgets et leurs affectations en créant à partir de l’unité (et pas ex-nihilo) les nombres monétaires correspondant à l’évaluation des besoins. En traitant le vote et la monnaie comme des fonctions numériques basées sur des opérations de langage et pas sur des opérations matérielles, on aboutit à une approche informationnelle qui quitte le champ des transformations irréversibles pour accéder enfin au champ des transformations réversibles. Ceci confirme que la sortie des pratiques de comptabilisation basées sur les valeurs discrètes (la monnaie et le vote perçus seulement comme des valeurs discontinues dans lesquelles il faut absolument accumuler le maximum de points) et la mise en place de pratiques innovantes de calcul basées sur les valeurs continues (la monnaie et le vote se co-produisant réciproquement par l’intermédiaire de leurs fonctions numériques complémentaires) spécifie le mode de gouvernance de l’économie de la conjonction.
La représentation comptable de l’économie conjonctive
« Dans les communautés que j’ai créé, la monnaie et l’économie sont tout simplement des histoires racontées afin de mesurer la valeur des projets passés et futurs acceptés par le groupe. Dans les communautés que j’ai créé, les fictions sont fabriquées et exécutées avec légèreté, et quand la gravité de l’existence revient, les histoires conservées peuvent être facilement éditées pour faire évoluer les circonstances économiques et politiques et embrasser les notions d’utilité, d’équité et d’équilibre ».
« Dans les communautés que j’ai créé, l’économie est d’avantage perçue comme une philosophie que comme une science. Elle concerne le cœur et l’esprit plutôt que la matière physique et la forme. L’illusion que l’économie se trouve à l’extérieur des émotions est une maladie traitée avec compassion. Car j’ai vu des effondrements de sociétés quand les mirages monétaires sont étudiés comme des forces plutôt que comme des fictions écrites en mathématiques et entrelacées avec le fonctionnement subtil de la psyché ».
« Dans les communautés que j’ai créé, je regarde les éléments essentiels et commence à codifier. L’agriculture, la médecine, l’architecture, l’art, l’éducation, la technologie et la spiritualité dans leurs formes premières constituent des fondamentaux susceptibles de soutenir le discours de l’être (Soi). Ces domaines peuvent être personnalisés pour répondre aux besoins de chaque individu, et quand l’équité est prioritaire et mise en pratique, cela signifie un haut niveau d’accomplissement de la société humaine ».
« Dans les communautés que j’ai créé, l’échange et la monnaie sont de simples variations sur la notion de partage, formalisés pour calculer et mesurer l’évolution du niveau de confiance. Dans les communautés que j’ai créé, les arts de la confiance et de la reconnaissance de la vérité sont nourris et pratiqués avec une attention studieuse, les commerces sont conduits à travers la profondeur de l’observation, et la richesse se déduit non pas des chiffres stockés, mais par le poids de la sagesse transmise et réalisée dans chaque génération ».
Les théories monétaires sont vraies quand nous sommes conscients qu’elles sont des histoires construites par l’imagination et que la science monétaire n’est qu’un art de la fiction. La monnaie et la loi pourraient être définies comme des fictions qui produisent des effets dans le réel. La monnaie et la loi servent autant à compter qu’à être racontées, ce qui atteste que ce sont des nombres. Or les nombres comme le disait déjà Héraclite, c’est de l’histoire. Les nombres racontent les époques, les croissances et les déclins de civilisations, les répartitions des richesses et des ressources. Chaque nombre que nous utilisons pour quantifier le monde est imbriqué dans le tissu de récits humains. Ainsi, un budget national n’est pas seulement un tableau de chiffres; c’est un récit de priorités politiques, un reflet des valeurs sociales et une cartographie des espoirs et des craintes d’une population.
En envisageant la monnaie de cette manière, nous ouvrons la voie à une compréhension plus flexible et plus constructive de la valeur. Elle n’est plus une entité fixe mais un concept fluide, qui peut être adapté aux besoins changeants de la communauté. Cela nous permet de repenser les fondements sur lesquels nos sociétés sont bâties, en mettant l’accent sur la collaboration, la durabilité et le bien-être collectif plutôt que sur la compétition, l’urgence permanente et l’accumulation individuelle. Les histoires monétaires que nous choisissons de raconter créent les structures de pouvoir et l’horizon existentiel de nos communautés. En redéfinissant ces récits, nous pouvons remodeler nos économies pour qu’elles soient plus inclusives et adaptatives, en devenant enfin de vrais instruments de justice sociale et de progrès environnemental. C’est dans ce cadre que la monnaie, en tant que fiction acceptée, gagne une nouvelle puissance transformative, non seulement dans la manière dont elle est perçue, mais dans la manière dont elle façonne activement les réalités présentes et futures.
Philosophiquement, la relation entre les nombres et les histoires est ancrée dans le concept de la représentation. Les nombres ne sont pas seulement des abstractions ; ils sont des symboles, chargés de significations au-delà de leur valeur faciale. Ils sont utilisés pour modeler nos compréhensions du monde et pour construire des réalités qui, bien que basées sur des abstractions, ont des conséquences concrètes dans le monde physique. En considérant les nombres comme des histoires, nous reconnaissons leur rôle dans la création de nos réalités économiques et juridiques. Par exemple, le produit intérieur brut d’un pays est un chiffre qui résume non seulement l’état économique d’une nation mais aussi les choix historiques, les modes de gestion, les crises traversées et les espoirs d’avenir. Ces nombres, alors, ne sont pas statiques ; ils sont dynamiques, évoluant avec chaque décision politique, chaque changement dans les politiques économiques, et chaque fluctuation dans les relations internationales. Dans une telle perspective, nous pouvons dire que les nombres, tout comme les récits, sont sujets à prévisions, à interprétations et à recommandations.
Considérer les nombres comme des histoires nous aide à comprendre leur pouvoir : ils ne sont pas de simples indicateurs passifs, mais des forces actives qui façonnent la politique, l’économie et même la culture. Ils ont le pouvoir de définir des réalités, de justifier des actions et de modeler l’avenir. Si le nombre en tant que chiffre isolé ou rattaché à un fait observable relève bien d’une nécessité basée sur le devenir des choses, les rapports entre les nombres relèvent quant à eux d’un acte basé sur nos possibilités intrinsèques de liaison. Bien qu’il existe une infinité de nombres, nous ne connaissons à ce jour que deux modes de représentations numériques : celles qui séparent et qui sont basées sur l’addition inversée ayant comme centre la valeur nulle (donc rien « entre eux »), et celles qui réunissent et qui sont basées sur la multiplication inversée ayant comme centre l’unité (donc un pivot ou un nœud commun). C’est de ces deux modes de représentations que découlent ce que nous appelons l’économie disjonctive qui sépare et oppose les valeurs en cherchant à les équilibrer autour du centre neutre zéro, et l’économie conjonctive qui traite les valeurs comme des grandeurs complémentaires en les générant et en les articulant par l’unité.
La différence entre l’addition inversée et la multiplication inversée repose sur leur manière d’aborder les relations entre les valeurs. Ces concepts, bien que tous deux mathématiques, ont des implications profondes en comptabilité et en économie. En mathématiques, l’addition inversée repose sur l’idée de symétrie autour de zéro. Pour chaque valeur positive, il existe une valeur négative équivalente telle que leur somme est égale à zéro. Par exemple, si x est un nombre, alors son opposé −x satisfait x+(−x) = 0. Cette opération est utilisée pour équilibrer des valeurs et maintenir une symétrie autour du point neutre zéro, en traitant les valeurs comme des entités distinctes pouvant être annulées par leur opposé. En revanche, la multiplication inversée repose sur l’idée de symétrie autour de l’unité commune. Pour chaque valeur, il existe un réciproque tel que leur produit est égal à un. Par exemple, si x est un nombre non nul, alors son inverse multiplicatif 1/x satisfait x*1/x = 1. Cette opération est utilisée pour transformer des valeurs de manière complémentaire, créant des relations où chaque élément participe à un tout unifié et relié aux autres.
En comptabilité, l’addition inversée est utilisée dans la tenue des livres en partie double. Chaque transaction affecte au moins deux comptes de manière égale et opposée. Par exemple, si une entreprise achète des fournitures pour 100 €, cela augmente les actifs (fournitures) de 100 € et diminue les actifs (cash) de 100 €, maintenant ainsi l’équilibre : 100+(−100) = 0. L’objectif est de maintenir l’équilibre comptable, où les débits doivent toujours égaler les crédits, reflétant ainsi une vue nette de l’état financier. Bien que moins courante en comptabilité traditionnelle, la multiplication inversée pourrait être utilisée pour modéliser les impacts de nos investissements dans le développement durable. Par exemple, les modèles de croissance économique durable mettent l’accent sur les investissements dans l’éducation et la santé, qui, bien que coûteux à court terme, génèrent des bénéfices à long terme multiplicatifs pour la société. Cette approche met l’accent sur l’intégration des valeurs et la création de structures durables, où les éléments économiques ne sont pas seulement équilibrés mais interconnectés de manière à renforcer les liens communautaires et la résilience systémique de l’ensemble des agents reliés par leurs valeurs.
Si on se réfère à la logique propositionnelle, l’économie conjonctive peut être symbolisée par la fonction propositionnelle XNOR (équivalence) dans laquelle A -><- B est vrai quand ils ont les mêmes valeurs d’entrée, tandis que l’économie disjonctive peut être symbolisée par la fonction propositionnelle XOR (ou exclusif) dans laquelle A <- -> B est vrai si les valeurs d’entrée de A et de B sont différentes. Il découle de cette observation une conséquence intéressante, à savoir que seule une économie conjonctive du développement humain est susceptible d’accéder à la logique de l’algèbre propositionnelle car son principe d’équivalence général autorise un traitement symbolique, scriptural et informationnel des valeurs. A contrario, l’économie disjonctive que nous associons à une économie des choses reste enfermée dans une approche comptable basée sur les valeurs discrètes et discontinues qui lui ferme en grande partie les portes du calcul propositionnel dans la mesure où la quasi-totalité de ses opérations doivent être référées à la sphère matérielle.
Conclusion : En comprenant que la comptabilité conjonctive se distingue de la comptabilité disjonctive par le passage de la logique du OU à la logique du ET, nous sommes en mesure de poser les fondements d’une économie du développement humain basée sur une totalité qualitative et pas sur des parties quantitatives. On peut légitimement penser qu’un tel changement de perspective dans notre manière de représenter les valeurs et les nombres est suffisant pour donner naissance à une nouvelle histoire. Cette histoire nouvelle et ancienne, c’est celle de l’économie et de la société du Tao qui a pris conscience du bénéfice qu’il y aurait à gérer ses valeurs comme des rapports de valeurs et des ordres de grandeurs complémentaires et pas comme des quantités antagonistes qui cherchent à s’annuler mutuellement.
Les balances trinitaires de l’économie conjonctive
Contrairement à la croyance commune, une balance comptable possède trois états possibles et pas deux états possibles. En effet, une balance comptable peut être négative (-) ce qui renvoie aux notions de dette, de déficit, de dépense et de passif, elle peut être positive (+) ce qui renvoie aux notions de créance, d’excédent, de recette et d’actif, et elle peut enfin être équilibrée, ce qui signifie que l’on a établi un rapport de proportionnalité entre les créances et les dettes, les excédents et les déficits, les dépenses et les recettes. Le fait que ce troisième état soit passé totalement inaperçu dans un monde où l’on fonctionne depuis 5 siècles sur une comptabilité en partie double (ou logique bivalente) et pas en comptabilité en partie triple (ou logique trivalente) en dit long sur notre ignorance du concept d’équilibre dont dépend l’avènement d’une économie de la réciprocité.
Le troisième état de l’équilibre comptable est un état à part entière, qui n’apparaît pas dans la comptabilité de notre époque qui considère que l’équilibre équivaut à une annulation des valeurs positives et négatives. Or cette annulation n’est pas une règle absolue : elle ne vaut que si l’on reste dans le cadre des opérations basées sur l’addition inversée. Toutefois, si l’on change de perspective pour formaliser les opérations par la multiplication inversée, l’équilibre ne renvoie plus à une valeur nulle mais à une valeur neutre, ou plus exactement à un centre neutre. Cette observation est conforme aux équations de la logique à trois valeurs qui étend la logique booléenne traditionnelle en ajoutant un troisième état, souvent noté “Inconnu”, “Indéterminé” ou “Neutre”. Dans le contexte de la balance comptable trinitaire, nous pouvons établir la correspondance suivante :
- Vrai (T) : Correspond au Positif (+).
- Faux (F) : Correspond au Négatif (−).
- Neutre (N) : Correspond à l’Équilibre (+/−).
Les logiques ternaires de Kleene, Łukasiewicz et autres offrent des cadres pour manipuler trois valeurs logiques. Cependant, dans le contexte comptable, nous pouvons adapter ces logiques pour mieux refléter les notions d’équilibre financier. Par exemple, la logique de Lukasiewicz met l’accent sur la valeur “Inconnu” comme un état intermédiaire. Dans notre cas, l’état d’équilibre (+ / −) n’est pas “Inconnu”, mais un état défini où les valeurs positives et négatives sont en proportion. Nous pouvons même affirmer que dans l’économie de la réciprocité, l’équilibre comptable produit par le centre neutre est le seul état “connu”, ou “reconnu”. Il est connu à la fois comme état souhaitable vers lequel doivent tendre toutes les opérations du réseau d’échange par la valeur , mais également comme somme compensatoire de l’ensemble des créances et des dettes de chaque agent permettant de s’assurer que l’état d’équilibre est respecté.
Il découle de ce que nous avons énoncé plus haut que les propriétés profondes des opérations comptables proviennent moins des signes arithmétiques que nous employons (le + et le -) que des structures algébriques des opérations qui se ramènent fondamentalement aux deux catégories de l’addition inversée et de la multiplication inversée.
La comptabilité moderne, telle que nous la connaissons aujourd’hui, repose depuis le XVe siècle sur le principe de la comptabilité en partie double. Ce système, formalisé par Luca Pacioli en 1494, fonctionne essentiellement sur le principe de l’addition inversée, qui oppose le positif (+) et le négatif (−), et utilise les opérations d’addition et de soustraction pour enregistrer les transactions financières. Bien que la multiplication et la division soient présentes dans les analyses financières, elles ne sont pas fondamentales dans l’enregistrement des transactions quotidiennes.
Est-il possible d’affirmer que contrairement aux apparences, le (+ / —) et le (× / ÷) relèvent tous deux de la multiplication inversée et pas de l’addition inversée, dans la mesure où l’addition inversée ne fait qu’annuler les termes de ses opérations alors que la multiplication inversée maintient les termes opposés et inverses dans leur rapport à l’unité ? La réponse est oui. Il est possible de considérer que les opérations de + / − (plus sur moins) et × / ÷ (multiplier sur diviser) sont interprétables comme des formes de multiplication inversée plutôt que d’addition inversée. Dans le cadre de la multiplication inversée, les termes opposés sont en effet conservés dans un rapport inverse à l’unité, ce qui n’est pas le cas avec l’addition inversée, où les termes s’annulent. Voici une analyse pour clarifier ce point :
- Addition et Soustraction : Dans une addition inversée, on associe traditionnellement les valeurs positives et négatives comme des opposés qui s’annulent dans la mesure où a + (−a) = 0. L’opération inverse, dans ce cas, revient à une opération d’annulation des termes : il s’agit bien d’un rapprochement des valeurs qui tendent vers zéro.
- Multiplication et Division : En revanche, la multiplication inversée (qu’on pourrait également qualifier de division réciproque dans certains contextes) ne conduit pas à l’annulation des termes, mais à leur transformation en réciproques respectifs, maintenant ainsi un rapport dynamique avec l’unité. Par exemple, a × 1/a = 1, mais le terme initial et son inverse sont maintenus en tant qu’opposés dans le rapport d’unité. Cela se traduit par une continuité dans leur relation au produit total, par opposition à une annulation qui se traduit par une séparation.
Cette distinction est cruciale, car elle montre que la multiplication inverse ne cherche pas à éliminer un terme par annulation, mais à réorganiser la relation des termes autour de l’unité. Autrement dit, l’inversion de la multiplication crée un équilibre basé sur le rapport et non sur la neutralisation. Cela illustre le fait que l’opération inverse de la multiplication maintient un cadre de proportionnalité où les termes inversés ne se neutralisent pas mais se complètent dans une structure relationnelle autour de l’unité, ce qui les distingue fondamentalement de l’addition inversée. Quelles seront les conséquences de cette distinction fondamentale pour les relations économiques et sociales ? C’est la question centrale que nous traitons dans les concept d’économie conjonctive et disjonctive.
- Concept de valeur économique et monétaire : Dans les systèmes économiques, la valeur est souvent gérée comme une somme de biens, de services ou de capitaux, où chaque transaction tend à s’annuler ou à équilibrer une autre (par exemple, des dépenses et des recettes équilibrées dans une comptabilité). Cependant, la multiplication inversée suggère un système où les valeurs ne s’annulent pas simplement par des échanges opposés, mais créent des rapports continus qui maintiennent leur proportion et évoluent, ou plus exactement co-évoluent. Cela signifie que, plutôt que de « détruire » la valeur (comme dans une logique de dépréciation totale ou de consommation absolue), les relations économiques seraient organisées pour maintenir une valeur constante dans le temps, et ce, même si elle change de forme. Les systèmes de crédit ou d’investissement à long terme en sont une illustration : ils créent des rapports de valeur continue qui s’ajustent sans effacement.
- Résilience et interdépendance des acteurs : La neutralisation (comme dans l’addition inversée) produit des acteurs indépendants qui se combattent et cherchent à se détruire (ou à s’annuler) dans leurs interactions. Mais, en appliquant la logique de la multiplication inversée, les relations sociales et économiques entre acteurs (par exemple, entre entreprises, travailleurs, institutions publiques) deviennent interdépendantes et indéterminées. Ici, chaque acteur existe non pas en opposition, mais en rapport proportionnel avec l’autre, dans un équilibre sans cesse renouvelé par les initiatives individuelles et collectives. Une société structurée selon ce modèle favorise des interactions symbiotiques où la prospérité d’un acteur est reliée à celle des autres, encourageant ainsi des alliances de long terme plutôt qu’une neutralisation mutuelle ou un effacement des acteurs moins puissants.
- Système de dette et redistribution : L’addition inversée, dans le contexte des dettes, implique souvent une logique de remboursement qui vise l’annulation totale (effacement de la dette). Par contre, la multiplication inversée dans un système de dette implique un rapport proportionnel et perpétuellement ajusté à l’unité, permettant de maintenir une « dette positive » sous la forme d’un équilibre dynamique sans exigence d’effacement absolu. C’est cela que nous appelons un système d’échange coopératif et mutualiste basé sur l’équilibre de la balance des paiements. Dans les relations sociales et économiques, cela se traduit par une possibilité de redistribution permanente où la dette ou le crédit sont maintenus comme des états multiples d’équilibres financiers dynamiques, sans qu’ils ne cherchent un point zéro. Cela pourrait inciter à des structures de micro-crédit où la dette n’est jamais « annulée » mais redéfinie dans des termes d’investissement mutuel.
- Soutenabilité et croissance durable : La multiplication inversée crée des relations où les ressources et le capital ne sont pas épuisés dans une logique de consommation-épuisement, mais circulent selon des rapports proportionnels en rapport avec une unité monétaire jouant le rôle d’unité-pivot et plus seulement d’unité de compte. Cela produit une croissance économique soutenable et plus seulement maximaliste, où les ressources sont constamment réutilisées et recyclées dans des proportions équilibrées. Les relations de type multiplicatif pourraient structurer des modèles de croissance qui ne nécessitent pas de renouvellement infini des ressources, mais permettent une expansion harmonieuse grâce à une réutilisation et une transformation des actifs existants, avec un impact réduit sur l’environnement.
- Équité et structure des pouvoirs : Enfin, en termes de justice sociale, l’addition inversée, en annulant les termes opposés, peut encourager des systèmes où les inégalités sont compensées ponctuellement et souvent dans l’urgence mais sans véritable traitement de fond. La multiplication inversée, en revanche, maintient un rapport proportionnel entre les individus, où les écarts sont constamment ajustés pour garantir un équilibre dynamique. Cela pourrait influencer la conception des politiques publiques vers une répartition du pouvoir et des ressources qui ne s’efface pas par des mesures correctives ponctuelles mais évolue constamment en fonction des contributions et des besoins des individus vers une nouvelle forme de justice intégrative.
Au final, la distinction entre ces deux types d’inversions n’est pas seulement mathématique. Elle permet de modéliser des systèmes sociaux, économiques et financiers où les valeurs ne se neutralisent pas mais sont maintenues en équilibre, renforçant la continuité, l’interdépendance et la durabilité dans des rapports humains et économiques. Un tel système pourrait encourager des pratiques d’échange où le but n’est pas d’éliminer les différences mais de les transformer en une dynamique collective cohérente, tournée vers l’équilibre et la stabilité à long terme.
Dans la perspective d’une application qui permettrait de la faire fonctionner dans les systèmes économiques et sociaux, il est nécessaire de relier la multiplication inversée à la logique d’équivalence mathématique en s’appuyant sur le concept de proportionnalité inhérente aux opérations inverses. Dans une balance des paiements ou tout autre système économique, l’équivalence ne repose pas seulement sur l’addition et la soustraction, mais aussi sur la capacité de maintenir des rapports équilibrés entre les flux, ce qui est un fondement de la multiplication inversée.
Afin de démontrer que les opérations faites selon le principe de la multiplication inversée respectent bien les propriétés de la relation d’équivalence, nous allons nous concentrer sur l’unité qui est le pivot (ou centre neutre) de la multiplication inversée, l’axe par lequel se réalise l’équilibre dynamique des balances comptables, et le répartiteur autour duquel s’organisent les rapports de valeurs entre les agents. En effet, nos recherches nous ont conduit à la conclusion qu’il n’existe aucune autre solution que celle qui consiste à recourir à l’unité comme pivot ou centre neutre de multiplication inversée pour démontrer que cette opération peut satisfaire les propriétés de réflexivité, de symétrie et de transitivité dans le cadre d’une relation d’équivalence. La multiplication inversée, dans ce cas, se structure autour de l’unité comme point d’équilibre dynamique, créant une relation d’équivalence basée sur la proportionnalité des termes par rapport à l’unité qui pourrait tout à fait être une unité monétaire.
En prenant l’unité comme pivot central, il est facile de démontrer que la multiplication inversée respecte bien les trois propriétés mathématiques qui permettent de reconnaître une relation d’équivalence :
- Réflexivité : Chaque élément, en relation avec son inverse, ramène à l’unité, assurant la réflexivité.
- Symétrie : Si un élément est en relation inverse avec un autre autour de l’unité, cette relation est réciproque.
- Transitivité : L’équilibre dynamique autour de l’unité se maintient à travers plusieurs termes en chaîne, garantissant la transitivité.
Ainsi, en considérant l’unité comme point central, la multiplication inversée peut être vue comme une véritable relation d’équivalence qui s’étend aux systèmes de balances équilibrées en comptabilité, où chaque flux est maintenu en rapport dynamique avec un autre, créant une structure stable et interconnectée autour de l’équilibre dynamique. C’est sur un tel fondement que nous sommes désireux de construire de nouvelles balances comptables ternaires (ou tri-unitaires) basées sur la relation d’équivalence et mettant en oeuvre les principes de la multiplication inversée.
Première balance trinitaire : besoins ≡ capacités
Alors que l’économie disjonctive a toujours séparé comptablement les besoins et les capacités, les dépenses et les recettes, les coûts et les prix ainsi que toutes les autres grandeurs économiques, le fonctionnement ternaire de l’économie conjonctive aboutit à les considérer comme des grandeurs corrélées et complémentaires.
Le principe fondamental de la balance ternaire est la réciprocité des besoins et des capacités :
1. Les besoins génèrent les capacités et les capacités génèrent les besoins
2. Les besoins et les capacités ont une valeur équivalente mais qui est inverse
3. Les besoins et les capacités croissent de façon proportionnelle et continue
4. Les besoins et les capacités forment une unité indivisible et inséparable.
Dans de telles conditions, on peut parler d’une économie intégrée qui est capable de faire fonctionner les besoins et les capacités de façon complémentaire et synergétique sur un principe d’équivalence.
Dans l’économie du développement humain, les besoins et les capacités peuvent être représentés comme deux vecteurs symétriques qui se créent, s’équilibrent et s’annulent autour d’une valeur neutre.
Si on les représente de façon arithmétique, les besoins tendent vers l’infiniment négatif et les capacités tendent vers l’infiniment positif. Cela signifie que plus un besoin est grand, plus sa valeur négative augmente, tandis qu’à l’inverse, plus une capacité est grande, plus sa valeur positive augmente. Comme dans cette comptabilité du développement humain, la valeur des besoins est toujours équivalente à la valeur des capacités, on dira que les valeurs négatives et positives opposées sont équivalente par rapport au centre neutre de l’addition inversée, la valeur zéro qui doit toujours permettre de les annuler pour que l’équilibre et l’équivalence soient respectés. Cela signifie donc que dans l’économie du développement humain, la valeur zéro représente un potentiel de création monétaire neutre, inclusif et ordinal (ensemble vide) permettant de financer toutes les capacités (dettes) qui correspondent aux besoins (créances).
Si on les représente de façon logarithmique, les besoins tendent vers l’infiniment petit et les capacités tendent vers l’infiniment grand. Cela signifie que plus un besoin est grand, plus sa valeur relative diminue, tandis qu’à l’inverse, plus une capacité est grande, plus sa valeur relative augmente. Comme dans cette comptabilité du développement humain, la valeur des besoins est toujours équivalente à la valeur des capacités, on dira que les valeurs inversées infiniment petites et infiniment grandes sont équivalente par rapport au centre neutre de la multiplication inversée, la valeur un qui doit toujours permettre de les annuler pour que l’équilibre et l’équivalence soient respectés. Cela signifie donc que dans l’économie du développement humain, l’unité de valeur un représente un potentiel de création monétaire neutre permettant de financer toutes les capacités (dettes) qui correspondent aux besoins (créances) reconnus socialement.
Ce mécanisme mathématique permet de recenser les besoins et les capacités, de les évaluer de façon objective, de les monétiser et de financer leur réalisation. Elle établit une unité contradictoire entre les besoins et les capacités leur permettant de croître et de décroître d’une façon proportionnelle et continue. Elle correspond à une valeur « patrimoniale » des besoins et des capacités qui est comparable à un bilan comptable. On pourrait également comparer cela à une économie créative dans laquelle les valeurs négatives ou infiniment petites des besoins représentent des réalités intérieures aux êtres humains (négatives comme des besoins ou des manques), tandis que les valeurs positives ou infiniment grandes des capacités représentent des réalités extérieures aux êtres humains (positives comme des réalisations ou des changements perceptibles dans le monde). Ainsi on peut dire que l’objectif premier du système comptable conjonctif serait de faire correspondre la réalité intérieure et la réalité extérieure des êtres humains, ce que l’on peut qualifier de temps synchronique, alors que le système comptable disjonctif ne fait que conditionner la satisfaction des besoins à l’obtention préalable et forcément décalée des capacités financières permettant de les réaliser, ce qui correspond à un temps diachronique strictement extérieur et étranger au temps humain.
C’est cette conjonction consciente du monde intérieur et du monde extérieur que l’on nomme “chemin de la grande réconciliation “ ou « Tao ». Contrairement aux dogmes de l’économie disjonctive selon laquelle le système de régulation de l’offre et de la demande serait nécessairement dénué de toute intention car régi par des grandeurs d’ordre statistique, l’économie conjonctive semble nous montrer une nouvelle voie dans laquelle l’intentionnalité se combine à des opérations de transformations réversibles sur les valeurs car elle s’appuie sur la multiplication inversée des besoins intérieurs et des capacités extérieures des êtres humains.
Seconde balance trinitaire : ressource ≡ emploi
Cette balance nous enseigne qu’un marché des réciprocités est en réalité un marché du travail dont l’objectif est de permettre à chacun de travailler dans des projets et de faire travailler les autres dans ses projets. Pour faire fonctionner cette balance, on dépose la ressource monétaire dans un carré qui est un espace public fermé comme l’enceinte d’une ville ou une place de marché à l’intérieur de laquelle les personnes se rencontrent pour faire usage de cette ressource. L’intérêt de cette approche locale et concrète réside dans la liberté qu’elle laisse à chacun de déterminer le montant de la ressource tout comme le contenu de ses emplois. Elle constitue donc une incitation forte à la coopération entre les agents dans la mesure où cette ressource fonctionne comme un potentiel monétaire qui ne peut s’actualiser que par ses emplois. De cette façon, on n’a jamais de création monétaire qui ne soit pas corrélée à une création de valeur. Cela distingue la balance trinitaire ressource-emploi du système inflationniste de la création de monnaie bancaire basée sur la dette dans lequel les effets ne valent rien. C’est cette équivalence entre le montant de la ressource et la valeur de ses emplois qui justifie qu’on représente ce processus de monétisation de la production comme une balance spécifique.
Dans ce marché des réciprocités, nous avons une structure basée sur des engagements mutuels : chacun travaille pour le projet des autres et chacun peut faire travailler les autres dans son propre projet, chacun peut développer son projet individuel et chacun est libre de s’inscrire dans un projet collectif de type public. Quel que soit le type de projet dont on parle, le bénéfice se mesure par la distribution des résultats (fruit) des travaux aux participants aux projets. Un projet a de la valeur économique quand il permet de rémunérer par ses fruits l’ensemble des personnes qui ont pris part à sa réalisation, et il a de la valeur sociale et écologique si en plus des personnes qui y participent, il permet de rémunérer (ou d’avantager) l’ensemble des membres humains et non humains qui forment la communauté. Ainsi on peut dire qu’un projet strictement économique permet de satisfaire des intérêts individuels et égoïstes, mais si ce projet arrive à concilier des intérêts économiques, sociaux et écologique, il possède alors une dimension plus collective et altruiste qui le rend capable de mettre en convergence intérêt particulier et intérêt général.
Sachant que le bénéfice (ou valeur réelle d’attribution) se mesure en termes de rapports de propriété, il conviendra de rappeler que la maximisation des besoins et des capacités est corrélée à l’accessibilité des biens :
En économie, on peut classer les biens en fonction de deux critères : la notion de rivalité d’usage entre consommateurs, la consommation d’un bien par un consommateur limitant la capacité des autres à consommer le même bien, et la notion d’exclusion, qui renvoie à la capacité d’accaparer un bien en en payant le prix et d’exclure de son usage toutes les autres personnes qui n’ont pas pu se l’approprier à temps. Il en découle quatre statuts différents pour les biens que l’on appelle les biens privatisés (rivaux et excluables), les biens de club (faible rivalité mais excluabilité forte), les biens communs (non excluables mais avec des rivalités fortes) et enfin les biens publics (non rivaux et non excluables). Cette classification établie par Paul Samuelson et développée ensuite par Vincent et Elinor Ostrom établit une corrélation entre le statut des différents biens, leur excluabilité et leur rivalité, et leur degré de rareté et de consomptibilité. Cette présentation basée sur les interactions sociales et pas sur la nature matérielle des biens suggère également une correspondance entre le niveau des satisfactions et les différents types de propriétés, comme si le niveau des satisfactions était plus liée à des questions de structure socio-économique que physique.
Sachant que dans la balance ressource-emploi dont on parle ici, la ressource monétaire qui sert à financer les emplois est constitutive d’une ressource monétaire publique, il serait assez cohérent que les biens créés grâce à ces emplois tendent également vers le statut de bien public. Sur le plan social, écologique et économique, on peut réellement hiérarchiser les biens en fonction de ces critères. Si l’on définit la puissance de la satisfaction par une fonction de répartition de la valeur (ou d’allocation de ressources), alors on arrive vite à la conclusion qu’un bien privatisé vaut moins qu’un bien de club qui vaut moins qu’un bien commun qui vaut moins qu’un bien public. Pour ne commettre aucune erreur d’interprétation sémantique, il convient de ne pas confondre la notion de bien public avec la notion de bien étatique qui est un monopole de fait issu d’une gestion administrative des choses. Aujourd’hui, les biens étatiques sont des biens à faible rivalité mais à excluabilité forte qui s’apparentent à des biens de clubs. Or il s’agit ici de financer essentiellement les projet coopératifs et collaboratifs qui sont bénéfiques pour chacun et pour tous.
La balance ressource-emploi-engendre un marché des réciprocités :
- Incitation à la coopération :
- Le financement est disponible principalement pour les projets coopératifs qui tendent vers le bien public.
- La réussite des projets repose sur la participation active de la communauté.
2. Équivalence ressources-emplois :
- Chaque euro de ressource monétaire doit correspondre à une création de valeur par les emplois financés.
- Cela évite l’inflation et assure que la monnaie représente une véritable valeur économique.
3. Distribution des bénéfices :
- Les bénéfices des projets réussis sont redistribués, créant une boucle de rétroaction positive.
- L’évaluation des bénéfices est basée sur la convergence de critères économiques, sociaux et écologiques.
Troisième balance trinitaire : richesse ≡ humain
L’un des problèmes les plus insolubles de l’économie disjonctive provient de la nature mathématique de ses opérations qui est le reflet de sa conscience monétaire. Comme elle est monodimensionnelle et qu’elle s’enferme dans des logiques quantitatives, l’économie disjonctive va avoir une attraction pour les grands nombres. Elle tend vers l’infiniment grand tout en demeurant dans des échelles finitésimales, et c’est probablement ce paradoxe numérique qui a donné naissance à l’homo economicus, qui cherche sans cesse à maximiser son capital et ses revenus.
Il découle de cette passion pour les grands nombres que l’économie disjonctive fonctionne sur un principe de divergence des intérêts. La raison est que plus les nombres deviennent grands sans être reliés les uns aux autres, plus ils s’éloignent naturellement les uns des autres dans un mouvement divergent. Cela explique que dans le capitalisme financier, les états de richesse des personnes sont non seulement très inégalitaires, mais que l’inégalité est leur seul fondement. La richesse définie selon les critères de la maximisation des quantités d’argent gagné n’aurait aucune chance d’exister si elle ne s’appuyait sur des nombres incommensurablement grands et éloignés les uns des autres. Or toutes les distances sociales entre les personnes se mesurent par ces nombres.
A contrario, l’économie conjonctive travaille à l’intérieur de l’unité monétaire, ce qui l’amène à proposer des échanges de valeur basés sur des quantités monétaires infinitésimales. Dans cette création de valeur au moyen de la partition collective de l’unité de base monétaire, il est logique que l’économie conjonctive aboutisse à la convergence des intérêts humains se traduisant par une réduction de la distance sociale. Dans cette perspective inversée, nous sommes amenés à considérer chaque personne comme une richesse. En effet, l’économie conjonctive va naturellement encourager les comportements coopératifs par lesquels chacun sera amené à établir des rapports de valeur. Or quand on revient sur le terrain des rapports de valeur, chacun sait que la seule richesse est humaine.
Une bonne manière de modéliser l’économie conjonctive consiste à penser en termes de rapports de valeur. Imaginons un cas assez simple où dans une ville de 100.000 habitants, on créé un actif monétaire open source basé sur une unité monétaire de 1 euro. Sur cette base, on va proposer différents types de rapports qui serviront de balance des échanges et permettront aux personnes de réaliser des transactions sur différents ordres de grandeurs.
Imaginons quatre rapports fondamentaux :
En nous basant sur ces rapports, on perçoit facilement les équivalences qu’ils permettent de produire dans les autres rapports :
Bien qu’ils apparaissent sous des formes différentes, tous ces échanges de valeurs sont équivalents. Cela signifie que les variations de l’amplitude des termes de l’échange ne dérogent jamais à l’équilibre du rapport de base. Quelle que soit la quantité de richesse en jeu, les participants sont toujours reliés à l’unité du rapport fondamental qui a été choisi collectivement.
C’est à l’expression d’un rapport de valeur décidé collectivement que devrait se consacrer ultimement l’échange réciproque, rapport de valeur qui se déploie autour d’une unité de base servant de noeud, de répartiteur et d’arbitre. L’existence d’un pivot monétaire jouant le rôle d’une unité commune devrait créer pour la première fois dans l’histoire une convergence de tous les intérêts en incitant les personnes à coopérer pour maximiser leur satisfaction. Loin de chercher à faire des nombres l’expression de la quantité abstraite, l’économie conjonctive les emploie à figurer la forme ou à estimer la valeur de tels ou tels ensembles qui peuvent être présentés comme des ensembles de choses, mais qu’on tend toujours à confondre avec les ensembles humains. Les nombres disent la forme et la valeur des choses, parce qu’ils signalent la composition, la cohérence et la puissance du groupe humain auquel ces choses appartiennent.
Tableau collectif d’un rapport 1/1
On pourra ainsi conclure qu’une science économique juste socialement et écologiquement est un échange ou un partage qui ne fonctionne plus en termes de quantités toujours insuffisantes ou excessives car non structurées, mais en termes d’ordres de grandeurs qui sont les multiples et les sous-multiples d’une unité ou d’un rapport. C’est à cette seule condition que nous sortirons des errances d’une pseudo science économique destructrice des valeurs sociales et écologiques pour entrer dans une économie multidimensionnelle dotée d’une unité scalable réellement intégratrice des valeurs et de la diversité des besoins humains.
Par ailleurs, c’est en fonctionnant enfin comme un ordre de grandeur que la mesure par les unités monétaires sera réellement alignée avec les mesures de la physique par sa capacité renouvelée à déployer les valeurs dans les échelles de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Dans une économie équitable, les agents peuvent choisir librement l’échelle monétaire qu’ils vont déployer comme un nouvel espace monétaire, dans la mesure où les échanges ne sont plus déterminés par les quantités détenues mais par les rapports de valeur équilibrés entre les agents.
Quatrième balance trinitaire : moins ≡ plus
La quatrième balance trinitaire, symbolisée par le signe de réciprocité de Lévi-Strauss qui équilibre le moins et le plus, introduit une vision radicalement nouvelle de l’économie : celle d’une comptabilité des échanges fondée sur la symétrie dynamique entre ce qui est donné et ce qui est reçu. Dans ce cadre, la balance économique ne fonctionne plus sur la base de l’accumulation ou de la distribution arbitraire de quantités finies, mais selon un principe de transformation réciproque où chaque action trouve sa contrepartie naturelle dans le système. Lévi-Strauss, en anthropologue des structures fondamentales, identifie ce point central où le positif et le négatif ne s’annulent pas mais se complètent, créant un troisième état de l’échange. Cet état correspond à une approche où les échanges ne sont plus perçus comme des transactions disjointes et linéaires, mais comme des interactions cycliques qui renforcent l’équilibre des relations.
Dans une économie de la réciprocité, le moins et le plus ne sont pas des oppositions destructives mais des forces créatrices interdépendantes. L’accumulation de créances n’a plus pour but de concentrer la richesse dans les mains de quelques-uns, tout comme la production de dettes ne vise plus à asservir des individus ou des communautés entières sous le poids d’une obligation perpétuelle. Au contraire, la réciprocité monétaire établit un lien de responsabilité mutuelle où chaque créance implique un engagement pour l’équilibre de l’ensemble. La monnaie elle-même change de nature : elle cesse d’être un simple instrument d’échange pour devenir un vecteur de relation. En adoptant une unité infinitésimale et réversible, la monnaie n’est plus liée à la quantité d’actifs physiques ou à la valeur accumulée, mais à l’intensité et à la fréquence des échanges entre les membres de la communauté.
Ce modèle rappelle les systèmes d’échange traditionnels des sociétés que Lévi-Strauss a étudiées, où l’économie ne se réduit pas à des transactions marchandes mais est intégrée dans le tissu social et symbolique. Dans ces sociétés, l’échange n’a pas pour but d’accumuler de la richesse personnelle, mais de renforcer les liens sociaux et de garantir la solidarité collective. L’économie de la réciprocité s’inspire de cette même logique, appliquée à une échelle systémique et modernisée. Dans une perspective conjointe de sciences sociales et d’économie, ce modèle se structure autour de l’idée que la richesse est avant tout relationnelle. La valeur se mesure non par des unités monétaires rigides mais par la capacité à maintenir des relations équilibrées et durables entre les acteurs économiques.
Concrètement, cela implique une transformation profonde de la comptabilité. La balance des paiements n’est plus un simple bilan d’entrées et de sorties, mais une véritable cartographie des engagements réciproques entre les agents économiques. Chaque transaction devient un acte d’ajustement dans un système où le moins et le plus se répondent. Par exemple, dans une communauté appliquant la balance trinitaire, un investissement n’engendre pas nécessairement un retour linéaire et immédiat. Au lieu de cela, il crée un potentiel d’échange, une capacité de contribution à l’écosystème économique qui, en retour, génère des possibilités équivalentes pour d’autres acteurs. La monnaie infinitésimale, en tant que support de cet échange, sert à stabiliser le système en évitant les effets d’accumulation excessive ou de dette chronique.
Cette perspective modifie également la notion de dette. Dans l’économie disjonctive, la dette est souvent perçue comme un poids, une charge qui doit être éliminée le plus rapidement possible sous peine de voir sa valeur croître de façon exponentielle. Dans l’économie de réciprocité, la dette devient une promesse de contribution, un engagement à redonner à la communauté ce qui a été reçu, mais sans la pression de l’accumulation d’intérêts. Le remboursement d’une dette n’est plus conçu comme une extraction de ressources d’un acteur pour enrichir un autre, mais comme une transformation positive de la valeur qui circule dans l’ensemble du système. Ainsi, au lieu de créer de l’inflation en multipliant les dettes, ce modèle régule les flux de manière à maintenir la cohésion des acteurs et la continuité des échanges. Il devient possible de maximiser les dettes ET les créances dans un système d’échange coopératif, mais également de minimiser les dettes ET les créances dans un système d’échange plus mutualiste, dans une décision basée sur les buts des agents.
Cette approche renverse les paradigmes traditionnels de la croissance. Dans l’économie de la réciprocité, le développement ne repose pas sur une expansion sans fin des ressources ou des bénéfices individuels, mais sur l’intensification des échanges et l’enrichissement des relations. La monnaie infinitésimale permet de miniaturiser les unités d’échange, rendant chaque transaction plus légère et plus intégrée dans le tissu économique sans provoquer de surchauffe inflationniste. En maintenant les montants échangés dans une échelle adaptée aux besoins et aux capacités réelles de l’économie, ce système prévient les déséquilibres structurels et favorise une croissance soutenable, alignée sur les ressources et la résilience de la communauté. Ainsi la mise en oeuvre de la réciprocité est une belle manière d’illustrer le célèbre axiome anglais “less is more”.
La réciprocité redéfinit la finalité même de l’économie. La richesse ne réside pas dans l’accumulation d’actifs financiers ou de biens matériels, mais dans la capacité à soutenir un réseau d’échanges équitables, où chaque acteur peut tour à tour être créancier et débiteur en fonction des besoins collectifs. Ce réseau favorise une solidarité active et adaptative, où les excédents de certains compensent les manques des autres dans un processus organique d’ajustement continu. Loin des logiques centralisatrices et autoritaires, cette balance trinitaire de Lévi-Strauss dessine une économie véritablement coopérative et mutualiste, capable de fonctionner sur des bases écologiques et sociales durables parce qu’elle place l’équilibre au centre de son mécanisme de consensus et renonce à entretenir un déséquilibre (dette, déficit) permanent.
Puisque cette image de la balance +- nous est léguée par un anthropologue, et pas n’importe lequel, nous ne ferons pas offense à nos collègues économistes qui pensent avoir tout compris en leur rappelant que le modèle de l’économie de la réciprocité est pratiqué depuis des milliers d’années par les peuples premiers, bien avant l’arrivée du capitalisme et du communisme qui ont tout déséquilibré en essayant de faire passer l’ordre économique naturel sous l’emprise de l’idéologie politique. Nous payons aujourd’hui au prix fort cette tentative malheureuse qui consiste à nous couper de la nature pour vivre dans un monde artificiel et déshumanisé.
Cette quatrième balance trinitaire pourrait offrir des réponses aux crises systémiques modernes. Face aux déséquilibres de l’économie disjonctive et aux limites des modèles redistributifs, l’économie de la réciprocité propose une troisième voie, un modèle circulaire où la valeur est régénérée à chaque échange. La transformation du moins en plus et du plus en moins n’est pas un jeu de manipulation comptable mais une réalité sociale fondée sur l’interdépendance humaine et la responsabilité collective. En honorant le point central de réciprocité, nous retrouverons une économie qui, plutôt que de s’épuiser dans la concurrence ou de s’enliser dans la dépendance, renoue avec des principes d’équité et de respect mutuel, propres aux structures fondamentales des sociétés humaines.
Cinquième balance trinitaire : quantité ≡ valeur
Dans une économie de la disjonction, les rapports économiques entre les agents sont basés sur des quantités. Imaginons un budget de 100 millions d’euros pour une ville de 100.000 habitants. Si on souhaite procéder à une allocation de ressources égalitaire pour permettre à chacun de développer un projet, on aura recours à une division : 100.000.000 / 100.000 = 1000. Ainsi chaque habitant recevra un capital de 1000 euros pour développer son projet. Que ce capital soit donné sous la forme de dons ou d’un crédit, que le budget ait été obtenu par un impôt ou par un mécénat ne change pas grand-chose à la situation. Dans tous les cas, on dispose d’une quantité d’argent limitée que l’on va diviser entre le nombre de participants pour distribuer équitablement la ressource. Donc comme dans la métaphore du gâteau, plus on aura de participants et moins la part de chaque personne sera importante. Le gros problème avec cette approche de la division est qu’on arrive vite à la conclusion que les personnes sont des charges et que plus on va limiter le nombre de personnes qui participent à la ressource, plus la richesse à partager entre ceux qui sont éligibles augmente. On n’imagine pas combien cette vision de la richesse nous influence profondément et conditionne nos idéologies politiques, que ce soit sur les questions sociales, migratoires, urbaines, culturelles, agricoles, urbaines.
Pour comprendre la nature nouvelle de l’opération de mise à disposition de la valeur dans une économie de la conjonction, nous allons passer en revue toutes les opérations mathématiques que nous ne ferons pas.
Nous ne ferons pas X — 100.000.000 = 100.000.000 euros comme les chercheurs d’or, car il s’agit d’une opération soustractive (ou extractive) d’une ressource naturelle qui rattache l’existence de la monnaie à la captation de ressources énergétiques, agricoles, maritimes ou minières. Nous ne ferons pas 1+1+1+1+1… = 100.000.000 euros comme les banques fiduciaires, car il s’agit d’une opération de création monétaire virtuelle qui n’aura pour conséquence que d’engendrer de la dette qui s’inscrira comme -1–1–1–1–1–1… = 100.000.000 euros. Nous ne ferons pas 1000*100.000 = 100.000.000 euros, car on ne peut multiplier la monnaie que par des objets, ce qui obligerait à adopter l’attitude mercantiliste dont nous savons que le système de traitement comptable de la valeur est incapable de répondre aux besoins humains fondamentaux du développement durable. Enfin comme nous venons de le dire, nous ne ferons pas 100.000.000 / 100.000 = 1.000, soit en divisant une somme d’argent finie entre un nombre fini de personnes, soit en demandant aux personnes de contribuer de façon égalitaire par l’impôt en donnant chacune 1.000 euros, car il s’agit d’une approche de redistribution basée sur les théories de l’Etat Providence dont nous connaissons toutes les vicissitudes, tant en terme de déficit public que dans son incapacité à mobiliser les moyens qui permettraient de rentrer réellement dans une économie du développement durable.
Dans une économie de la conjonction, les rapports économiques sont basés sur les ordres de grandeur. Cela signifie que la ressource monétaire à partager n’a plus vocation à être divisée, mais va servir de base mathématique pour permettre aux personnes de développer des rapports d’échanges réciproques sur différents niveaux ou échelles. Plutôt que de travailler dans la multiplicité monétaire comme l’ont fait toutes les opérations mathématiques antérieures, nous allons travailler à l’intérieur de l’unité monétaire en procédant à une division multiplicative. Concrètement, nous allons effectuer une transformation linéaire dans laquelle nous utilisons une base commune par exemple 10 euros à laquelle nous appliquons la formule 10 / 0,000.001 = 100.000.000 euros. Cette transformation linéaire est une application involutive par laquelle on agrandit temporairement une certaine somme d’argent (par exemple 10 euros) afin de procéder à des transactions à l’échelle qui sont programmées à l’avance, puis on rapetissit cette somme en la faisant revenir à son état d’origine. On pourrait définir l’opération mathématique de l’économie conjonctive comme un échange réversible qui atteste de la nature informationnelle et neg-entropique de l’unité de base monétaire.
Un banquier verrait dans ce type d’opération un simple crédit porteur d’un risque de remboursement et pouvant générer de l’inflation parce que comme beaucoup de personnes, il penserait qu’on augmente temporairement la masse monétaire et qu’on va distribuer 100.000.000 euros aux personnes par un tour de magie. Si l’économie conjonctive était ainsi, elle ne diffèrerait pas des théories de l’hélicoptère money qui sont défendues par les théoriciens monétaristes prônant une création monétaire distributive comme moyen de relance de la consommation. Or ce que propose l’économie conjonctive est foncièrement différent, car dans notre cas, l’opération de création monétaire involutive est équilibrée parce que les 100.000.000 euros représentent la valeur que les personnes s’engagent à produire par leurs échanges, tandis que sa valeur inversée 0,000.000.01 représente la monnaie infinitésimale qui servira de moyen de paiement pour procéder aux transactions. Ceci explique pourquoi des bases de 1.000 euros ou même de 10 euros sont trop importantes pour ce type d’opération, et qu’il est préférable de travailler sur une base 1 pour que la valeur créée soit toujours l’image fidèle de son inverse monétaire.
La monnaie ainsi crée s’appelle la monnaie infinitésimale car en divisant la quantité de monnaie nécessaire pour procéder à un paiement, on aboutit à une revalorisation de la valeur de l’unité de compte monétaire. A contrario, le crédit en monnaie finitésimale dévalorise la monnaie car il ne fait que multiplier la quantité de monnaie en circulation pour procéder à un paiement. L’économie conjonctive est donc une pratique antinomique à celle de l’économie disjonctive dans laquelle les opérateurs bancaires et étatiques jouent un rôle central dans la destruction de la valeur.
La nature mathématique de son processus de création monétaire nous éclaire sur les opérations proposées dans le cadre de l’économie conjonctive, qui sont essentiellement des opérations de valeur, dans la valeur et pour la valeur. C’est par la miniaturisation qu’un système devient puissant, fonctionnel et beau, comme en témoigne par exemple le doublement périodique de la puissance des microprocesseurs. On pourra également expliquer cela en disant que l’économie conjonctive repose sur des instruments mathématiques plus évolués que ceux des banques.
Sixième balance trinitaire : tarification ≡ monétisation
Imaginons qu’on ait un groupe de personnes qui, à partir d’une unité monétaire de base, aient le droit de produire tous les ordres de grandeur monétaires sous la forme de rapports de valeurs (par exemple 1239/1239 ou 23/23) afin de procéder à des échanges. La règle est que les ordres de grandeur monétaire que chacun produit doivent être équilibrés afin de respecter le rapport de 1/1 de l’unité de base des échanges. Comment pourrait fonctionner un tel système d’échange où l’accumulation d’argent n’est plus un objectif, étant donné que l’unité de base monétaire commune permet à chacun de générer autant de monnaie qu’il souhaite ?
Dans un tel système d’échange, où chaque individu peut produire des rapports de valeurs monétaires à volonté sur tous les ordres de grandeur de son choix, la logique des échanges évoluerait fondamentalement par rapport à un système monétaire traditionnel. Voici quelques idées clés pour comprendre les termes de cette nouvelle logique :
- Il existe une différence fondamentale entre un échange monétaire réciproque et un échange monétaire non réciproque : dans la réciprocité, on a une commutativité complète entre prix et monnaie, ce qui n’est absolument pas le cas dans le capitalisme financier. On a une monétisation des prix et pas seulement une tarification monétaire. Du coup, ce n’est pas l’absence de monnaie qui créé l’échange par la valeur, mais c’est au contraire la capacité de monétisation également distribuée qui élimine les stratégies de recherche de profit et de concentration du capital en organisant l’échange sur des rapports de valeurs équilibrés.
- La monétisation des prix est rendue possible par l’usage d’une unité de base commune permettant à chaque agent de procéder à des règlements de valeurs enregistrés comme une grandeur dérivée de l’unité de base dans un grand livre de compte public destiné à mémoriser et à contrôler la conformité des transactions au rapport de valeur qui fonde l’unité de compte commune et fait office de règle mathématique des échanges.
- Dans ce système, la monnaie n’a plus de rareté, puisque chacun peut générer autant de rapports monétaires équilibrés qu’il le souhaite. La monnaie devient une simple unité de compte et de mesure de valeur, sans valeur intrinsèque ou spéculative car elle ne conditionne plus la capacité d’échange des agents mais permet de l’accomplir.
- Les échanges monétaires se concentreraient sur la valeur d’utilité et d’équité des biens et des services. Les participants ne chercheraient pas à accumuler de la monnaie, mais plutôt à obtenir des biens et services qui satisfont leurs besoins ou améliorent leur bien-être. Chaque transaction impliquerait une évaluation directe de la valeur relative des biens et services échangés en termes de coût et de valeur. Par exemple, si une personne souhaite échanger des pommes contre des oranges, les deux parties doivent s’entendre sur un rapport de valeur (ex: 3 pommes pour 2 oranges) basé sur leur perception de l’utilité et de la valeur de chaque bien.
- La transparence devient cruciale, car chaque rapport de valeur doit être équilibré. Les participants auraient besoin d’une compréhension claire et commune des valeurs relatives des biens et services pour que les échanges soient perçus comme équitables. Cela pourrait encourager une plus grande communication et négociation entre les participants. Élimination de la Spéculation et de l’Accaparement. La spéculation sur la monnaie et l’accumulation monétaire seraient fortement réduits car la monnaie ne serait plus appréhendée comme une unité de compte reposant sur les valeurs discrètes, mais comme une unité de base relevant des valeurs continues. Cela pourrait réduire les inégalités économiques et favoriser une distribution plus équitable des ressources et des emplois.
- Les incitations économiques se déplaceraient vers la production de biens et services de haute qualité. La valeur d’un bien ou d’un service serait jugée sur sa capacité à satisfaire des besoins ou à créer de la valeur pour les autres, plutôt que sur sa capacité à générer un profit monétaire.
- En éliminant la variabilité monétaire et la spéculation, le système pourrait atteindre une plus grande stabilité économique. Les crises financières résultant de bulles spéculatives et de fluctuations monétaires seraient minimisées, car les échanges seraient basés sur des valeurs réelles et perçues plutôt que sur des évaluations monétaires fluctuantes. Cela permettrait également de décorréler le coût de la valeur.
- Enfin, ce système pourrait encourager l’innovation et la créativité, car les participants seraient motivés à produire des biens et services qui ont une valeur réelle et perçue, plutôt que de simplement chercher à maximiser des profits monétaires. Le fait que l’on ne raisonne plus en termes de valeur absolue mais en termes de rapport de valeur inciterait les personnes à inventer de nouveaux types de rapports plus complexes et élaborés, ce qui aurait sans doute pour effet d’encourager les acteurs de la civil tech et de l’éco tech plutôt que ceux de la tech pure ou de la finance.
En résumé, la logique de ce système d’échange serait centrée sur l’utilité, l’équité, et la valeur réelle des biens et services, en éliminant la spéculation et l’accumulation de richesse monétaire. Les échanges seraient basés sur des rapports de valeur équilibrés, nécessitant une compréhension commune et transparente des valeurs relatives des biens et services échangés. En même temps, le recours à une base monétaire commune rendrait le système des échanges totalement scalable. On réaliserait probablement le “triangle impossible” scalabilité — décentralisation — sécurité.
Septième balance trinitaire : utilité ≡ équité
Loin d’être des valeurs opposées, l’utilité et l’équité devraient au contraire être appréhendées comme des valeurs inverses, autrement dit un système de valeurs contradictoire mais unitaire dont l’augmentation corrélative peut se mesurer par un gradient. On pourrait à ce titre mesurer la valeur des systèmes d’échange par une notation allant de 1 à 10 basée sur le gradient utilité-équité. Parce qu’elle se fonde sur un principe unitaire matérialisé par le recours à une base monétaire partagée et scalable, il semblerait que l’économie conjonctive soit à la fois optimale sur le plan de l’utilité et de l’amélioration du rapport au besoin réel, mais également sur le plan de l’équité et de la réduction des fraudes en tout genre.
La raison de cette réduction de la fraude provient des caractéristiques du système d’échange de la base monétaire commune. Dans ce système, la monnaie n’a pas de valeur intrinsèque et ne peut pas être accumulée pour obtenir un avantage financier. La motivation principale des agents devient donc la satisfaction de leurs besoins réels, ce qui réduit l’incitation à la fraude pour des gains monétaires. Les échanges reposent sur des rapports de valeur équilibrés, visibles et compréhensibles pour tous les participants. Cette transparence rend difficile toute tentative de manipulation ou de fraude, car les valeurs des biens et services doivent être justifiées et acceptées par les l’ensemble des parties de l’échange.
Le système favorise l’équité, car tous les agents ont la même capacité à produire des rapports de valeur à partir de l’unité de base commune. Cette égalité dans l’accès et la capacité à échanger contribue à une convergence des intérêts, où chacun est motivé par la satisfaction de ses besoins plutôt que par la maximisation d’un gain financier. Le système d’échange est paramétrable collectivement ce qui autorise son pilotage par l’intelligence collective et la fonction de choix social. Chaque transaction nécessite un accord commun sur le rapport de valeur, ce qui implique une vérifiabilité des valeurs proposées. La nécessité d’une acceptation mutuelle des rapports de valeur rend les pratiques frauduleuses plus difficiles, car tout déséquilibre serait rapidement détecté et rejeté par les autres participants.
Les agents sont incités à produire et échanger des biens et services qui ont une réelle valeur utilitaire et qualitative. Cette orientation vers l’utilité réelle et perçue des biens et services décourage les pratiques frauduleuses qui viseraient à tromper les autres participants sur la valeur des échanges. La monnaie ne consiste plus en valeurs discrètes appropriables sous la forme d’unité de comptes, mais elle devient pour la première fois une valeur continue se matérialisant comme un ensemble de projections monétaires multi-échelles qui s’équilibrent et se structurent à partir d’une unité de base commune. Sans possibilité de spéculer sur la monnaie, les agents ne peuvent pas manipuler le système à leur avantage en créant des distorsions de marché. Les échanges se basent uniquement sur des valeurs perçues et réelles des biens et services, éliminant ainsi les pratiques spéculatives qui peuvent conduire à la fraude.
La communauté dans son ensemble bénéficierait d’un système équitable et transparent, ce qui encourage une responsabilité collective pour maintenir l’intégrité du système. Les tentatives de fraude seraient désapprouvées et contraires aux intérêts communs. Par ailleurs un tel système ne serait pas une poire pour la soif qui donnerait des miettes aux personnes en concentrant la richesse sur ceux qui sont proches des organes de création monétaire. Dans le système de la base monétaire commune, chaque agent se voit reconnaître pour la première fois dans l’histoire une capacité de création monétaire totalement décentralisée conformément à ses capacités et à ses besoins.
En résumé, un tel système d’échange, fondé sur des rapports de valeur équilibrés et une unité de compte commune, élimine les principales motivations et opportunités de fraude en centrant les échanges sur l’utilité réelle, la qualité et l’équité. Les mécanismes de transparence, de vérifiabilité et d’accord mutuel renforcent encore cette capacité à minimiser la fraude, créant ainsi un environnement économique plus juste et transparent. Il s’agit là d’une question absolument cruciale dans la mesure où la quasi-totalité des situations de sous-développement dans le monde sont imputables non pas au manque d’argent ou de financement, mais à la situation de corruption généralisée qui conduit certaines personnes à détourner les fonds destinés aux besoins de la collectivité pour leurs seule besoins personnels.
Huitième balance trinitaire : coûts ≡ prix
L’économie disjonctive basée sur le principe de la recherche de rentabilité enjoint les agents économiques à chercher constamment à minimiser leurs coûts et à maximiser leurs prix. Le coût et le prix fonctionnent donc comme deux vecteurs opposés dont le résultat est une différence constitutive du taux de profit. Il découle de cette dichotomie que nul ne peut accéder aux échanges s’il n’a pas réalisé un profit préalable qui va lui conférer la disponibilité financière (ou crédit) pour pouvoir procéder à des paiements (ou débit). Dans une telle approche, on observe la prééminence de l’approche par la différence où toute la chaîne de production a pour seul but de soustraire de la valeur.
A contrario, le fonctionnement ternaire de l’économie conjonctive conduit à percevoir le coût et le prix comme deux grandeurs inverses que chacun peut générer par une application involutive. Dans la mesure où les opérations se fondent sur une unité monétaire commune, toute division à l’intérieur de cette unité devient multiplicative.
L’une des avancées majeures de l’économie conjonctive est de différencier ce qui relève du coût et ce qui relève du prix en déplaçant chacun de ces termes dans un ordre de grandeur inverse et symétrique. Une telle approche permet à la fois de différencier l’ordre des coûts et l’ordre des prix mais également de les unifier autour de la base mathématique commune en cessant de les opposer. La conjonction unitaire de ces termes contradictoires est d’autant plus important quand on sait que Coût = Rapport = Besoin = Equité et que Prix = Valeur = Capacité = Utilité.
Economie disjonctive : Fonction arithmétique
Dans une structure arithmétique ayant pour centre la valeur 0 :
- Coût (ou besoin) et Prix (ou capacité) sont des valeurs opposées.
- Si le coût est 𝐶 et le prix est 𝑃 alors -C = P
- Exemple : Un prix de 150.000 euros est représenté comme un coût C = −150.000
- Si la différence entre le prix et le coût est la rentabilité R alors R = P — C
Dans l’économie disjonctive, on se concentre sur la différence entre le coût et le prix pour déterminer le profit ou la rentabilité des opérations. Ce rapport montre combien une entreprise gagne par rapport à ce qu’elle dépense. On peut donc dire que selon cette règle de calcul basée sur la logique soustractive, l’objectif est la rentabilité.
Economie conjonctive : Fonction logarithmique
Dans une structure logarithmique ayant pour centre la valeur 1 :
- Coût (ou besoin) et Prix (ou capacité) sont des valeurs inverses.
- Si le coût est C et le prix est 𝑃, alors C = 1/P.
- Exemple : Un prix de 150.000 euros est représenté comme un coût C = 1/150.000 ≈ 6.666 * 10^−6
- Si la division du coût par rapport aux prix est le rendement R’ alors on a R’ = P / C
Dans l’économie conjonctive, on se concentre sur la transformation et l’efficience dans l’utilisation des ressources, cad le rendement et pas la rentabilité. Le produit inversé coût-prix montre comment les besoins (coûts) sont transformés en capacités (prix), et comment les capacités (prix) sont transformables en besoins à satisfaire (coûts).
Dans ces deux types d’involutions mathématiques, les coûts sont associés aux valeurs de l’infiniment petit et de l’infiniment négatif, et les prix sont associées aux valeurs de l’infiniment grand et de l’infiniment positif, selon que l’on travaille dans l’ordre de l’addition inversée ou celui de la multiplication inversée.
L’avantage de cette définition rigoureuse du rapport coût-prix est qu’elle nous permet désormais de convertir les valeurs issues de la comptabilité disjonctive en valeurs passant dans la comptabilité conjonctive, ce qui peut constituer un avantage notamment pour les négociations sur les investissements.
L’intérêt majeur de cette balance coût-prix est qu’elle fournit un modèle de décroissance économique qui donnera à l’humanité la capacité de financer tous les besoins vitaux et pas seulement les besoins solvables. Par ailleurs elle fournit une règle de calcul basée sur le rendement et pas seulement sur la rentabilité qui devrait aboutir à une division de la ressource utilisée qui devient un multiple de la valeur produite.
En favorisant une vision de coûts réduits et finançables, ce système permettrait une participation plus large et équitable aux échanges économiques et sociaux en augmentant collectivement les pouvoirs d’achat. On peut donc considérer cette balance ternaire coûts-prix comme la meilleure réponse aux déraillements permanents de l’économie disjonctive basée sur la démultiplication de la masse monétaire et l’inflation.
Définir l’équivalence à partir des besoins les plus essentiels de toutes les personnes et pas seulement les plus pauvres (la chréia !) ce n’est pas rien, car cela défie la logique de l’économie capitaliste. Comment comprendre que le minimum puisse égaler le maximum ou encore le rien le tout ? C’est l’objet même de l’économie conjonctive de montrer qu’il est mathématiquement vrai que l’infiniment petit soit une forme inversée de l’infiniment grand.
Neuvième balance trinitaire : créances ≡ dettes
Dans l’économie disjonctive, les notions de créance et de dette sont liés à l’état positif ou négatif des nombre monétaires sur les comptes de résultat et les bilans. Dans une approche purement financière, on considère qu’une créance est la somme d’argent qu’un particulier ou une entreprise doit percevoir de la part d’un client, tandis que la dette est la somme d’argent qu’un particulier ou une entreprise doit payer.
Le fait que l’économie disjonctive n’utilise plus les nombres positifs ou négatif n’élimine pas les notions de créance et de dette mais les déplace sur une balance ternaire qui en renouvelle la signification. La transition de la terminologie de la “créance” et de la “dette” vers celle des “besoins” et des “capacités” dans les grands livres comptables refléterait une orientation plus axée sur les échanges de valeur tangible plutôt que sur les engagements financiers abstraits.
On aboutit alors aux définitions suivantes qui s’inscrivent dans une éthique de la réciprocité :
Besoins comme créances : dans un système comptable au service du développement humain, les “besoins” pourraient être comptabilisés comme des “créances” dont bénéficient la société ou des individus qui veulent les satisfaire. Par exemple, un besoin non satisfait de logement peut être vu comme une créance sur ceux qui peuvent fournir des solutions de logement comme cela est le cas par exemple dans le droit au logement opposable.
Capacités comme dettes : inversement, les “capacités” pourraient être envisagées comme des “dettes” envers la société, représentant l’obligation de mettre à disposition des compétences ou des ressources pour répondre aux besoins enregistrés. Une personne possédant un logement vacant, par exemple, aurait une “dette” sociale à utiliser cette capacité et à ne pas gaspiller cette ressource utile au besoin de logement général.
Dans le même ordre d’idée, la monétisation d’un besoin est une créance que l’on détient sur les individus ou les collectifs sociaux qui peuvent les satisfaire. A l’inverse, la monétisation d’une capacité de production engendre une dette qui se matérialise par une obligation de réaliser la capacité que l’on a financé.
Pour que les échanges soient équilibrés, Il s’agira de déterminer quels besoins des individus ou des communautés peuvent être satisfaits par des services ou des produits, et quelles capacités ou compétences peuvent être offertes sur le marché pour répondre aux besoins. Cela signifie que les capacités ne seront financées qu’à hauteur des besoins identifiés sur le marché, et que les besoins ne seront finançables qu’à hauteur des capacités existantes. L’approche équilibrée de la balance ternaire créance-dette étant basée sur la reconnaissance préalable des besoins et des capacités, elle évite de se retrouver dans l’endettement généralisé et permet de maintenir un haut niveau de dynamisme et de convergence des activités. Finalement, on a là encore une nouvelle preuve indiquant que l’ensemble de l’économie pourrait s’apparenter à une fonction de choix social basée sur un vote de préférence.
A partir du moment où nous posons la nouvelle égalité créance = besoin = coût et dette = capacité = prix, nous disposons de nombreuses correspondances entre les concepts fondamentaux de l’économie. Dans cette optique, nous allons compléter l’expression des rapports de valeurs en présentant les trois mises en rapport possibles.
Un rapport de valeur, noté R, entre deux biens ou services A et B peut être exprimé comme le quotient de leurs valeurs respectives exprimées dans une unité de base commune leur servant d’instrument de tarification et de transaction. Si V(A) est la valeur de A et V(B) est la valeur de B, alors le rapport de valeur est donné par :
Le rapport de valeur R entre deux biens ou services A et B peut être exprimé de plusieurs manières, en tenant compte des coûts et des prix, des besoins et des capacités, des créances et des dettes. Si C(A) est le coût de production de A et P(A) est le prix de A, et de même pour B, alors il existe trois types de rapports possibles entre ces deux groupes :
Les deux rapports « Coût à Coût » et « Coût à Prix » comparent des valeurs qui se situent toujours dans des ordres de grandeur homogènes. Ces rapports sont typiques des évaluations financières traditionnelles, où les coûts de production sont comparés entre eux et les prix de vente sont comparés entre eux.
Lorsqu’on compare les coûts de production de deux biens (Coût à Coût), on se concentre sur les dépenses engagées pour produire ces biens. Si une entreprise engage des coûts pour produire un bien, ces coûts représentent un investissement qui doit être récupéré. Si les coûts sont financés par des emprunts, cela crée des dettes. De plus, les coûts payés à des fournisseurs ou des partenaires créent des créances à récupérer, représentant l’attente de recevoir quelque chose en retour de l’investissement fait. Comparer les prix de vente (Prix à Prix) implique une notion de revenus attendus. Si une entreprise vend un bien à un certain prix, elle s’attend à récupérer ce montant. Cependant, si les ventes sont financées par des prêts ou des crédits aux clients, cela crée aussi des dettes. Les ventes réalisées à crédit créent des créances sur les clients, qui doivent payer leurs achats ultérieurement.
Dans ces deux configurations, l’économie disjonctive basée sur la dette et les créances reste dominante, car les entreprises et les individus s’engagent dans des transactions qui reposent sur des attentes financières futures.
Le rapport “Coût à Prix” établit une relation directe entre les coûts de production et les prix de vente. Cela reflète une économie plus dynamique et équilibrée, où les transactions sont basées sur des échanges réels de valeur plutôt que sur des engagements financiers abstraits. En représentant coût et prix comme des valeurs inverses et complémentaires, on crée un système où les dépenses (coûts) sont équilibrées par les revenus (prix), sans nécessité de recourir à des dettes pour combler les écarts comme c’est le cas pour toutes les entreprises confrontées en permanence à des décalages temporels de trésorerie qui mettent tout le système productif en péril. Cette question cruciale de la gestion des entrées et des sorties liées à une approche diachronique des flux génératrice de situations de dette permanente fait le lien avec la prochaine balance trinitaire des dépenses et des recettes.
Dixième balance trinitaire : dépenses ≡ recettes
Afin d’introduire directement une distinction décisive entre une économie disjonctive basée sur l’addition inversée et une économie conjonctive basée sur la multiplication inversée, nous dirons que dans la première, la décision de produire se fonde sur une nécessaire différence entre les coûts (assimilés à des dépenses) et les prix (assimilés à des recettes), ce qui justifie l’idée que la fonction de production est maximisée quand le profit est maximal. Comme nous l’avons vu dans la balance trinitaire créance-dette, il s’agit d’une approche diachronique qui génère des contraintes et un risque maximal, qui tiennent autant à la difficulté de financer les dépenses en empruntant des fonds ou en faisant soi-même l’avance des fonds préalablement aux recettes, qu’au risque portant sur l’incertitude concernant le niveau des recettes futures et leurs capacités à rembourser ou dépasser le montant des dépenses passées.
Concrètement, les chefs d’entreprise doivent gérer en permanence les décalages entre les entrées et les sorties, et c’est en fonction de cet exercice difficile qu’on évalue la qualité d’une gestion financière dans une entreprise, sachant que les banques doivent leur raison d’être à ce décalage et sont devenues des intermédiaires obligatoires.
L’économie conjonctive se démarque de tout cela par une approche synchronique des recettes et des dépenses qui est rendue possible par le fait que dans la multiplication inversée, les coûts qui correspondent aux dépenses sont systématiquement la valeur inversée des prix qui correspondent aux recettes. Cela signifie concrètement que les coûts augmenteront toujours de façon proportionnelle aux prix car on les définit préalablement de manière à englober tous les besoins que les personnes estiment nécessaires de valoriser au sein de la production. Il existe donc toujours un premier cercle minimal d’équivalence systématique entre les coûts engagées et leurs inverses qui sont les prix. Toutefois on peut aussi imaginer que la valeur de la production donc son prix sera très supérieure au coût de la production donc son rapport d’inversion, et partant de là on pourra tracer un second cercle du bénéfice économique, écologique et social à répartir collectivement. Comme dans une économie conjonctive, on se donne les moyens mathématiques et financiers de définir l’ensemble des dépenses (coûts) et des recettes (prix) à l’avance, on évite l’approche fragmentaire de l’économie disjonctive qui se perd à gérer de petits bouts de valeurs et de temps et avance dans l’inconnu en permanence.
C’est le fait de fonder des rapports de réciprocité basés sur la multiplication inversée entre des groupes humains désireux de lancer des projets et de générer de la force de travail qui produit le miracle économique. Un besoin d’investissement de 1.000.000 euros pour un projet d’assainissement des eaux sera traité comme une dépense génératrice d’une dette de — 1.000.000 euros et comme une recette conditionnée à des ventes de +1.000.000 euros dans une hypothèse optimiste et avec de nombreux aléas, tandis que ce même projet sera traité comme une dépense (ou un besoin) de 0,000.001 euros et comme une recette (ou une capacité) de 1.000.000 euros qui est sa valeur inversée dans la dynamique de l’investissement conjonctif.
Pour comprendre comment le système d’échange économique peut rester cohérent malgré les écarts de valeurs entre coûts (dépenses) et prix (recettes) et comment les individus peuvent accepter et manipuler des valeurs infinitésimales, il est essentiel de clarifier les avantages et les mécanismes sous-jacents de cette approche de l’échange.
Dans une économie conjonctive basée sur la multiplication inversée, chaque dépense ou coût C constitue l’inverse d’une recette ou prix P, et chaque recette ou prix P constitue l’inverse d’une dépense ou coût C. Cette équivalence fondamentale de la balance recette-dépense fournit des règles de calcul simples qui sont applicables à tout type de transaction :
Si un bien est vendu à un prix P, son coût de production correspondant est :
Inversement, si un coût de production est C, le prix correspondant est :
Cette relation garantit que les rapports coût/prix et prix/coût sont équilibrés de manière à maintenir un rapport constant lorsqu’ils sont multipliés ensemble. Cela assure une balance parfaite et un équilibre automatique dans les échanges économiques au fil du temps. En se basant sur cette inversion, le système élimine la nécessité de générer des profits, puisque chaque transaction est intrinsèquement équilibrée dès son origine.
Dans l’économie libérale traditionnelle, les recettes (revenus) sont utilisées pour financer les dépenses (coûts de production, salaires, etc.). Cependant, dans une économie basée sur la multiplication inversée, bien que les recettes soient importantes et les dépenses très faibles, le système maintient une cohérence et un équilibre en raison des relations inverses entre les coûts et les prix. L’équilibre est maintenu automatiquement par le principe de la multiplication inversée. Par exemple, si un bien est vendu à 100 euros, le coût correspondant serait 1/100 soit 0,001 euros. Dans cette configuration, bien que le coût soit extrêmement faible, il est proportionnellement équilibré par le prix qui correspond à ceux de la valeur réelle. Cela signifie que chaque euro dépensé est immédiatement contrebalancé par un montant inversement proportionnel en recettes, éliminant ainsi les déséquilibres traditionnels entre dépenses et recettes.
Pour simplifier la compréhension, il est crucial d’adopter une unité monétaire commune qui standardise les échanges et facilite la manipulation des valeurs infinitésimales. Des efforts éducatifs seront nécessaires pour expliquer les concepts de multiplication inversée et l’importance des valeurs infinitésimales dans ce système économique. Cela inclut la formation des professionnels de la finance et de l’économie, ainsi que du grand public. Le système assure une répartition équitable des ressources, car chaque coût est directement compensé par un prix inverse, évitant ainsi les inégalités générées par les marges bénéficiaires traditionnelles. En éliminant les décalages temporels, les charges de crédit, les attentes inutiles et les risques associés aux profits futurs, le système offre une plus grande stabilité financière. Les individus et les entreprises peuvent prévoir leurs finances avec plus de certitude. La simplicité et l’équité de ce système encouragent une participation économique plus large. Les barrières à l’entrée pour les nouvelles entreprises et les petits acteurs économiques sont supprimées pour une inclusion plus forte.
Le développement de logiciels et d’outils financiers spécifiquement conçus pour gérer les valeurs selon le principe de la multiplication inversée pourra aider à automatiser et simplifier les calculs nécessaires, rendant le système plus accessible. L’utilisation de la blockchain et des cryptomonnaies pourrait faciliter la mise en œuvre d’un système d’échange basé sur ces balances. Ces technologies peuvent assurer la transparence, la sécurité et l’efficacité des transactions. La mise en œuvre de projets pilotes dans des communautés ou des secteurs spécifiques peut démontrer les avantages pratiques de ce système. Ces projets peuvent servir de preuves de concept pour convaincre les sceptiques. Des simulations et des modèles économiques basés sur des données réelles peuvent montrer comment ce système fonctionne en pratique et quels bénéfices il apporte, comparé aux systèmes traditionnels dans lesquelles prévalent les quantités monétaires.
Onzième balance trinitaire : investissement ≡ consommation
Si l’on voulait réduire l’ensemble des opérations de l’économie monétaire à deux actes fondamentaux, alors ces deux actes seraient l’investissement et la consommation. Dans la perception énergétique que nous développons, ces deux actes sont opposés et complémentaires : l’investissement a pour objectif de maximiser la création d’énergie libre dans tout le système éco-sociétal en produisant des actifs dont le seul but est de distribuer de la force de travail à un maximum de personnes par une juste répartition dans l’usage de ces actifs. La consommation a pour but de permettre l’appropriation des produits du travail et par extension la consommation de ces produits par ceux qui les possèdent, ce qui a pour effet une réduction de l’énergie libre présente dans tout le système pour réaliser un travail.
Dans leur approche de l’investissement et de la consommation qui cristallisent leurs conceptions au sujet des rapports de valeurs, l’économie disjonctive et conjonctive adoptent des attitudes très différentes. Ces différences d’approches proviennent principalement du fait que l’économie disjonctive se fonde sur des transformations linéaires et irréversibles, alors que l’économie conjonctive se fonde sur des transformations cycliques et réversibles. Ces deux modes de transformations antagonistes ont des conséquences écologiques, économiques, sociales et même culturelles qui sont considérables.
Dans l’économie conjonctive, la sécurité du système est basée sur la réversibilité des coûts et des prix. C’est en fonction de cette transformation réversible que la balance des paiements et des achats fonctionne :
- Une personne qui paye en monnaie finitésimale (selon un prix) dans le cadre d’un investissement dispose immédiatement d’un pouvoir d’achat en monnaie infinitésimale (selon son coût) égal à la valeur actualisée de son paiement. Par exemple si une personne investit 10 millions d’euros dans un projet, elle dispose immédiatement d’un pouvoir d’achat de 0,000.000.1 euros basé sur la valeur actualisée dans le temps de son investissement. Ainsi il n’est pas nécessaire de disposer de parts sociales ou de garantie car l’investissement est conçu comme une simple transformation réversible d’un état monétaire finitésimal vers un état monétaire infinitésimal qui conserve la valeur.
- Une personne qui est payée en monnaie infinitésimale (selon son coût) pour un travail dans le cadre d’un projet dispose d’un pouvoir d’achat en monnaie finitésimale (selon les prix) égal à la valeur actualisée de son travail. Cela représente une sécurité forte du système qui garantit que les biens et les services produits par des investissements en monnaie infinitésimale ne seront achetables que par les personnes ayant accompli un travail pour obtenir de la monnaie infinitésimale. Par exemple une personne qui a été rémunérée 0,00025 euros dans le cadre d’un travail d’une durée de deux mois disposera d’un pouvoir d’achat égal à la valeur inverse de ce montant, soit 4.000 euros. Là encore, on voit bien que la réversion de la dimension infinitésimale vers la dimension finitésimale conserve la valeur.
Il en découle une distinction entre la réversion monétaire et la conversion monétaire qui est importante car elle explique la nature très différente des opérations en économie disjonctive et conjonctive :
- La conversion monétaire fait référence à un changement de forme ou de type de monnaie, souvent entre deux systèmes différents. Par exemple, convertir des euros en dollars ou des actions en liquidités. La conversion implique une transformation qui est irréversible. Cela peut également suggérer un échange ou une transformation linéaire.
- La réversion monétaire, en revanche, implique un retour à un état antérieur. Dans le contexte de l’économie conjonctive, la réversion suggère un cycle où la monnaie peut changer de forme mais revenir à son état initial, conservant ainsi la valeur à travers le temps. Cela est aligné avec l’idée de transformation cyclique et réversible.
Dans l’économie disjonctive, un investissement est une opération irréversible qui engendre une perte de pouvoir d’achat immédiat et un bénéfice ultérieur dans le meilleur des cas. Comme l’investissement ne comporte aucune garantie de retour en capital ou en revenu, il est généralement perçu comme un placement à fond perdu auquel on demande des gains toujours très élevés et très rapide. Le risque est géré statistiquement par les investisseurs qui doivent placer leur argent dans plusieurs projets différents en espérant en trouver un qui compensera la perte de tous les autres. Il en découle beaucoup de tensions entre les investisseurs et les porteurs de projets.
Dans l’économie disjonctive, une consommation est une opération irréversible basée sur le transfert définitif d’une quantité d’unités de comptes égale au prix demandé. Comme l’économie disjonctive confond constamment la monnaie avec le prix et conditionne la capacité d’échange au maintien de cette égalité, il en découle énormément de difficultés liées aux mouvements de valeur des prix et de la monnaie. Plus les prix augmentent et plus il faut de monnaie pour pouvoir procéder à un achat. A l’inverse, plus la masse monétaire augmente et plus cela aura comme effet une hausse générale des prix. C’est la raison pour laquelle on peut dire que la confusion entre prix et monnaie condamne toute l’économie conjonctive à osciller entre dépréciation monétaire et inflation des prix.
Le problème posé est celui de la conservation de la parité de pouvoir d’achat dans la durée. Dans l’économie disjonctive, on vit dans des grandeurs monétaires plus ou moins importantes que chacun cherche à maximiser. Chaque agent économique cherche à augmenter ses revenus et son patrimoine en disposant de la plus grande quantité d’argent possible. Or le paradoxe monétaire est que plus on a de monnaie en circulation dans le système, plus on a besoin de monnaie pour procéder à un achat, et moins cette monnaie a de la valeur. Si j’ai besoin de 0,00001 bitcoin pour acheter 1 dollar, cela veut donc dire que 1 bitcoin vaut 100.000 dollars. Si tous les habitants de la planète étaient des milliardaires, non seulement la situation serait insoutenable écologiquement, mais elle serait tout autant insoutenable économiquement, car au regard de la masse monétaire très importante en circulation, tous les prix d’achat des biens tendraient vers l’infini ce qui annulerait le pouvoir d’achat de toute cette monnaie.
L’économie disjonctive affirme que la monnaie est un instrument neutre des échanges, mais le fait qu’elle repose sur la comptabilité de l’addition inversée l’oblige à multiplier les unités de compte en manipulant constamment les termes des échanges. L’économie conjonctive semble la seule capable à utiliser la monnaie comme un instrument neutre des échanges car elle recourt à la multiplication inversée autour du centre neutre de valeur 1 et cela lui permet de différencier en les inversant les grandeurs relatives aux coûts et les grandeurs relatives aux prix. Le fait que les paiements se réalisent en monnaie infinitésimale peut sembler déconcertant à première vue, mais il s’agit pourtant du meilleur signe que l’économie conjonctive nous donne sur sa capacité à conférer à la monnaie une valeur forte basée non sur sa rentabilité mais son rendement.
Ainsi on peut conclure que dans une économie disjonctive, la quantité de monnaie tend vers l’infini tandis que sa valeur devient infinitésimale. A contrario dans une économie conjonctive, la quantité de monnaie devient infinitésimale et voit sa valeur tendre vers l’infini.
Douzième balance trinitaire : détention ≡ expression
Si l’on voulait réduire l’ensemble des opérations de l’économie monétaire à deux actes fondamentaux, alors ces deux actes seraient l’investissement et la consommation. Dans la perception énergétique que nous développons, ces deux actes sont opposés et complémentaires : l’investissement a pour objectif de maximiser la création d’énergie libre dans tout le système éco-sociétal en produisant des actifs dont le seul but est de distribuer de la force de travail à un maximum de personnes par une juste répartition dans l’usage de ces actifs. La consommation a pour but de permettre l’appropriation des produits du travail et par extension la consommation de ces produits par ceux qui les possèdent, ce qui a pour effet une réduction de l’énergie libre présente dans tout le système pour réaliser un travail.
Dans leur approche de l’investissement et de la consommation qui cristallisent leurs conceptions au sujet des rapports de valeurs, l’économie disjonctive et conjonctive adoptent des attitudes très différentes. Ces différences d’approches proviennent principalement du fait que l’économie disjonctive se fonde sur des transformations linéaires et irréversibles, alors que l’économie conjonctive se fonde sur des transformations cycliques et réversibles. Ces deux modes de transformations antagonistes ont des conséquences écologiques, économiques, sociales et même culturelles qui sont considérables.
Dans l’économie conjonctive, la sécurité du système est basée sur la réversibilité des coûts et des prix. C’est en fonction de cette transformation réversible que la balance des paiements et des achats fonctionne :
- Une personne qui paye en monnaie finitésimale (selon un prix) dans le cadre d’un investissement dispose immédiatement d’un pouvoir d’achat en monnaie infinitésimale (selon son coût) égal à la valeur actualisée de son paiement. Par exemple si une personne investit 10 millions d’euros dans un projet, elle dispose immédiatement d’un pouvoir d’achat de 0,000.000.1 euros basé sur la valeur actualisée dans le temps de son investissement. Ainsi il n’est pas nécessaire de disposer de parts sociales ou de garantie car l’investissement est conçu comme une simple transformation réversible d’un état monétaire finitésimal vers un état monétaire infinitésimal qui conserve la valeur.
- Une personne qui est payée en monnaie infinitésimale (selon son coût) pour un travail dans le cadre d’un projet dispose d’un pouvoir d’achat en monnaie finitésimale (selon les prix) égal à la valeur actualisée de son travail. Cela représente une sécurité forte du système qui garantit que les biens et les services produits par des investissements en monnaie infinitésimale ne seront achetables que par les personnes ayant accompli un travail pour obtenir de la monnaie infinitésimale. Par exemple une personne qui a été rémunérée 0,00025 euros dans le cadre d’un travail d’une durée de deux mois disposera d’un pouvoir d’achat égal à la valeur inverse de ce montant, soit 4.000 euros. Là encore, on voit bien que la réversion de la dimension infinitésimale vers la dimension finitésimale conserve la valeur.
Il en découle une distinction entre la réversion monétaire et la conversion monétaire qui est importante car elle explique la nature très différente des opérations en économie disjonctive et conjonctive :
- La conversion monétaire fait référence à un changement de forme ou de type de monnaie, souvent entre deux systèmes différents. Par exemple, convertir des euros en dollars ou des actions en liquidités. La conversion implique une transformation qui est irréversible. Cela peut également suggérer un échange ou une transformation linéaire.
- La réversion monétaire, en revanche, implique un retour à un état antérieur. Dans le contexte de l’économie conjonctive, la réversion suggère un cycle où la monnaie peut changer de forme mais revenir à son état initial, conservant ainsi la valeur à travers le temps. Cela est aligné avec l’idée de transformation cyclique et réversible.
Dans l’économie disjonctive, un investissement est une opération irréversible qui engendre une perte de pouvoir d’achat immédiat et un bénéfice ultérieur dans le meilleur des cas. Comme l’investissement ne comporte aucune garantie de retour en capital ou en revenu, il est généralement perçu comme un placement à fond perdu auquel on demande des gains toujours très élevés et très rapide. Le risque est géré statistiquement par les investisseurs qui doivent placer leur argent dans plusieurs projets différents en espérant en trouver un qui compensera la perte de tous les autres. Il en découle beaucoup de tensions entre les investisseurs et les porteurs de projets.
Dans l’économie disjonctive, une consommation est une opération irréversible basée sur le transfert définitif d’une quantité d’unités de comptes égale au prix demandé. Comme l’économie disjonctive confond constamment la monnaie avec le prix et conditionne la capacité d’échange au maintien de cette égalité, il en découle énormément de difficultés liées aux mouvements de valeur des prix et de la monnaie. Plus les prix augmentent et plus il faut de monnaie pour pouvoir procéder à un achat. A l’inverse, plus la masse monétaire augmente et plus cela aura comme effet une hausse générale des prix. C’est la raison pour laquelle on peut dire que la confusion entre prix et monnaie condamne toute l’économie conjonctive à osciller entre dépréciation monétaire et inflation des prix.
Le problème posé est celui de la conservation de la parité de pouvoir d’achat dans la durée. Dans l’économie disjonctive, on vit dans des grandeurs monétaires plus ou moins importantes que chacun cherche à maximiser. Chaque agent économique cherche à augmenter ses revenus et son patrimoine en disposant de la plus grande quantité d’argent possible. Or le paradoxe monétaire est que plus on a de monnaie en circulation dans le système, plus on a besoin de monnaie pour procéder à un achat, et moins cette monnaie a de la valeur. Si j’ai besoin de 0,00001 bitcoin pour acheter 1 dollar, cela veut donc dire que 1 bitcoin vaut 100.000 dollars. Si tous les habitants de la planète étaient des milliardaires, non seulement la situation serait insoutenable écologiquement, mais elle serait tout autant insoutenable économiquement, car au regard de la masse monétaire très importante en circulation, tous les prix d’achat des biens tendraient vers l’infini ce qui annulerait le pouvoir d’achat de toute cette monnaie.
L’économie disjonctive affirme que la monnaie est un instrument neutre des échanges, mais le fait qu’elle repose sur la comptabilité de l’addition inversée l’oblige à multiplier les unités de compte en manipulant constamment les termes des échanges. L’économie conjonctive semble la seule capable à utiliser la monnaie comme un instrument neutre des échanges car elle recourt à la multiplication inversée autour du centre neutre de valeur 1 et cela lui permet de différencier en les inversant les grandeurs relatives aux coûts et les grandeurs relatives aux prix. Le fait que les paiements se réalisent en monnaie infinitésimale peut sembler déconcertant à première vue, mais il s’agit pourtant du meilleur signe que l’économie conjonctive nous donne sur sa capacité à conférer à la monnaie une valeur forte basée non sur sa rentabilité mais son rendement.
Ainsi on peut conclure que dans une économie disjonctive, la quantité de monnaie tend vers l’infini tandis que sa valeur devient infinitésimale. A contrario dans une économie conjonctive, la quantité de monnaie devient infinitésimale et voit sa valeur tendre vers l’infini.
L’économie disjonctive traditionnelle se présente comme un échange horizontal qui sépare strictement les recettes et les dépenses, percevant les recettes comme des entrées de ressources financières et les dépenses comme des sorties de ces mêmes ressources. Ce modèle conduit souvent à une gestion axée sur l’équilibre budgétaire strict, où les recettes doivent compenser les dépenses pour éviter les déficits. En revanche, l’économie conjonctive propose une approche ternaire intégrée où les dépenses sont équivalentes aux recettes. Cela produit un équilibre opérationnel contradictoire basé sur le récit du déploiement vertical de l’unité monétaire par laquelle chacun est en mesure de produire et échanger de la valeur conformément aux principes de la réciprocité entre les participants.
Dans le paradigme de l’économie conjonctive, tout ce qui constitue une cause finale de l’économie disjonctive est donné dès le commencement : capacité financière, capacité d’échange, capacité de production. On pourrait affirmer que l’économie conjonctive est une économie des capacités humaines, alors que l’économie disjonctive est une économie des aliénations humaines. A ce titre, il n’est plus possible de raisonner en termes d’entrée ou de sortie, de dépense ou de recette. L’usage universellement partagé de l’unité monétaire commune ne génère plus aucune incitation pour rester cantonné dans cette logique du donner ou du prendre, de l’achat ou de la vente, de l’encaissement ou du décaissement. Elle vise surtout à créer les conditions d’une coprospérité qui réconcilie les dimensions économique, sociale et écologique en permettant à chacun d’exprimer et réaliser sa valeur avec, par et pour les autres.
Dans l’économie conjonctive, chaque agent dispose d’une unité monétaire de base qui est sa propriété naturelle et sociale, inaliénable et incessible, matérielle et symbolique, par laquelle il a la capacité d’émettre et de recevoir des propositions chiffrées de valeur. Le mouvement de valeur généré par la multiplication inversée autour de l’unité monétaire de base qui médiatise le rapport entre tous n’est plus celui de l’échange mais celui du partage qui est comparable à un acte de communication dans lequel chaque message émis et reçu est l’inverse du précédent. Dans cette structure de partage des valeurs qui s’articule autour de l’unité monétaire de base, les personnes ne sont plus des agents économiques qui font des échanges régulés par les offres et les demandes du marché, mais ils deviennent des agents conversationnels qui procèdent à des échanges basés sur la réciprocité de leurs propositions.
Dans une telle perspective, chaque agent se connectant aux autres agents au moyen de son unité monétaire de base devient un agent conversationnel relié aux autres dans un grand réseau social de création de valeur. On peut facilement se représenter cela comme un graphe dans lequel l’unité de base médiatrice de chaque agent est constitutive d’un nœud monétaire, tandis que les propositions de valeurs sont constitutives de champs monétaires qui se superposent en fonction de leur niveau de partage dans les différents ordres de grandeur où ils se déploient.
On comprend alors que la fonction de ce système de partage des valeurs soit de donner à chacun la capacité de faire et de ne pas faire certaines choses. En accord avec la diversité et la complexité des valeurs humaines, la balance du faire et du ne pas faire est beaucoup plus large que celle du donner et du recevoir. Une telle balance faire — ne pas faire valorise l’engagement dans des actions bénéfiques socialement, économiquement, écologiquement, et elle valorise également le renoncement à des actions nuisibles socialement, économiquement, écologiquement. Elle valorise certaines activités pour elles-mêmes (réflexivité) ou par rapport aux autres (réciprocité). Elle permet également de distinguer les activités en fonction de ce que nous échangeons et de ce que nous transmettons.
Dans tous les cas, le mode d’évaluation retenu ne peut plus être seulement le prix ou le coût, mais le coefficient de satisfaction synergétique des besoins multiplié par le nombre de personnes qui peuvent en bénéficier.
Ainsi le but de ce réseau social de partage de valeurs est de produire un partage d’expériences par lequel les personnes peuvent faire des choses côte à côte et pas seulement des transactions face à face. C’est une chose importante que de retrouver les bases du faire ensemble qui sont aussi celles du vivre ensemble et de l’habiter ensemble le monde.
Utiliser l’unité de compte monétaire comme un moyen d’expression des valeurs et plus seulement comme un moyen d’acquisition, comme un instrument de proposition de valeur et plus seulement comme un instrument de détention de valeur, comme un canal de communication des valeurs permettant à chacun de converser et plus seulement comme un instrument basique ne servant qu’à acheter et vendre, c’est acter la nature informationnelle de la monnaie ainsi que sa valeur symbolique.
On peut conclure que la balance expression — détention fait basculer la monnaie du Nomos au Logos. C’est le passage d’une monnaie écrite à une monnaie orale, d’une monnaie chiffrée à une monnaie dessinée, d’une monnaie figée à une monnaie vivante. Par la redécouverte de ce mouvement complémentaire de l’expression et de la détention, peut-être sommes-nous en train de revenir vers la juste articulation du Logos, du Nomos, du Mythos et de l’Ethos comme un nouveau contrat social.
Treizième balance trinitaire : ouverture ≡ couverture
Les corps monétaires sont définis par le potentiel de pouvoir d’achat attaché à des unités de compte particulières que l’on peut identifier comme les monnaies fiat et crypto et l’ensemble des instruments financiers. Ces corps monétaires relèvent d’une conception discontinue des valeurs dans laquelle les unités de compte sont perçues comme des valeurs discrètes que les agents doivent acquérir et accumuler pour accéder aux échanges.
Les champs monétaires sont représentés comme des équipotentiels reliant deux valeurs opposées ou inverses générées symétriquement par la valeur neutre de l’unité de base, qui précisément ne compte pas. On peut voir l’existence de ces champs monétaires comme des espaces de transformation monétaire dans lesquels l’usage partagé d’une unité de base augmente exponentiellement les capacités opérationnelles des agents.
Les champs monétaires sont formés par les propositions de valeur. En termes d’architectures, on aura soit un réseau centralisé avec une seule unité monétaire de base qui joue le rôle de pivot pour les déploiements et les repliements des champs de propositions de valeurs chiffrées de tous les agents, soit un réseau décentralisé dans lequel chaque agent dispose de sa propre unité de base monétaire pour émettre et recevoir des propositions.
En se basant sur la valeur de l’unité monétaire neutre ou nœud monétaire central jouant le rôle d’un centre de répartition, chaque agent peut ouvrir et fermer une position en créant temporairement un champ monétaire dans lequel besoins et capacités s’équilibrent réciproquement. On peut résumer cette opération de création du champ en disant que chaque agent définit l’amplitude de son champ monétaire par sa circonférence.
L’objectif de cet ensemble monétaire sera de produire un espace de couverture total. En effet, on considère que le champ monétaire atteint son taux de recouvrement maximal lorsque toute sa surface se superpose à la surface des autres champs monétaires. On peut en déduire que la capacité d’échange de l’agent que l’on mesure par la circonférence de son champ monétaire est conditionnée par sa capacité de recouvrement.
Comme cette pratique de création et d’extinction des champs monétaires [capacités — besoins] est partagée collectivement entre tous selon la capacité d’échange de chacun, il en découle que le tableau de tous les champs monétaires ressemblera à un lotus transparent composé de feuilles superposées les unes aux autres et dont la translucidité sera fonction du nombre de feuilles multiplié par les espaces de recouvrement.
Comptablement, les échanges vont prendre la forme d’ensembles de biens et services ou de champs numériques — d’énergie, de matière, d’informations — qui vont se superposer les uns aux autres. Cette superposition peut être totale ou partielle, et l’intrication est mesurée par le degré de chevauchement. Le nombre cardinal de chevauchements des besoins et des capacités pourrait servir de fonction d’utilité tandis que le nombre ordinal mesurerait l’équité. Plus les ensembles constitués par les champs monétaires se chevauchent, plus la dimension sociale est forte.
Si nous sortons de la logique des échanges exclusivement matériels pour nous placer dans une logique de partage matériel et informationnel, nous dirons alors que l’objectif du champ monétaire est de permettre aux agents de trouver un accord sur des propositions de valeurs. Dans cette optique, les agents parviennent à un très haut niveau de complexité dans le traitement de leurs propositions de valeurs chiffrées parce qu’ils ne se contentent pas d’échanger une fois mais qu’ils procèdent à des cycles d’échanges successifs que l’on appelle une conversation. Or on peut considérer que plus la conversation sera parvenue à un haut niveau de maturité et de complexité, et plus les propositions de valeur des différents agents atteindront un niveau remarquable d’intrication.
L’intérêt du champ monétaire (si on le compare aux unités de compte monétaires) est qu’il offre pour la première fois une représentation continue et bi-dimensionnelle de la valeur. Cette spatialisation des instruments d’échange monétaire est une bonne nouvelle car ils sont paramétrables de bien des façons. Ainsi la fameuse obligation de retour qui enfermait l’économie disjonctive dans une logique de rentabilité et de non-réciprocité systématique n’existe plus : grâce à la constitution ternaire du champ monétaire, il devient possible de définir de nouveaux rapports besoins capacité de chaque champ monétaire en tenant compte de la situation de chaque personne. Le champ monétaire apparaît donc comme un instrument de gestion puissant et subtil qui permet de mieux paramétrer les échanges de valeurs afin de donner aux sociétés la capacité de progresser en complexité dans leur développement.
Quatorzième balance trinitaire : actifs ≡ passifs
Alors que l’économie disjonctive peine à financer tous les besoins humains fondamentaux qu’elle considère comme des charges génératrices de dettes, l’économie conjonctive considère au contraire tous les besoins fondamentaux comme des ressources destinées à être transformées en emplois. Cette vision l’amène à estimer que les besoins fondamentaux sont des actifs financiers qui représentent des actifs monétisables au bilan.
La monétisation se définit comme l’introduction de nouvelles formes de moyen de paiement dans le circuit économique par les banques commerciales ou les banques centrales par augmentation simultanée de leur actif (sous forme de créances) et de leur passif (nouvelle monnaie émise en contrepartie de la créance). Comme cette augmentation est simultanée, symétrique et proportionnelle, on voit bien que cette pratique bancaire revient à utiliser un ordre de grandeur pour gérer les rapports de valeurs afin de respecter la neutralité des opérations.
Dans l’économie conjonctive, la monétisation est étendue à toutes les organisations publiques et privées qui veulent monétiser un besoin fondamental comme un ODD qu’elles valorisent au bilan comme un actif. Mathématiquement, la monétisation des actifs fonctionne comme une unité de distance par rapport à un objectif : plus l’objectif est éloigné, plus sa valeur infinitésimale au passif augmente, et plus la ressource qu’il va générer en contrepartie sera importante. Cela signifie que selon le principe énoncé en introduction de l’équivalence des besoins et des capacités, chaque organisation dispose de la faculté d’évaluer ses besoins et de se doter des moyens monétaires de les satisfaire durablement.
Lorsqu’un investissement est fait dans des domaines tels que la formation des employés, les projets écologiques, ou les contributions à la communauté, ces investissements sont enregistrés en tant que valeurs ou ressources financières (actif). Une quantité équivalente de monnaie est créée pour financer ces investissements, intégrée dans les états financiers sous forme de crédits environnementaux, sociaux ou de capital humain (passif). Une fois cette première étape réalisée, les actifs sont suivis et évalués pour mesurer leur avancée, leur impact et leur efficience. Des indicateurs de performance (KPI) spécifiques sont utilisés pour évaluer le succès des projets, tels que l’amélioration des compétences des employés, la réduction des émissions de CO2, ou le développement des infrastructures communautaires. Le but est de réduire le plus possible la distance existant entre l’état d’une organisation et ses buts.
Une fois que les objectifs des investissements sont atteints (par exemple, un employé formé, des émissions réduites, ou une infrastructure bâtie), l’actif est considéré comme ayant atteint son but et il peut devenir une capacité. L’objectif on le voit est donc de transformer un besoin ODD en capacité ODD. Pour que la relation de réciprocité soit complète entre besoin et capacité, il faudra toutefois reconnaître qu’au terme de la relation contradictoire qui les unit, une capacité ODD peut répondre à la satisfaction de nouveaux besoins ODD. Ce basculement se réalise quand la capacité ODD nouvellement créée devient un actif totalement ou partiellement open source, donc un commun mis au service de la satisfaction de nouveaux besoins. C’est à ce moment-là que se révèle tout son potentiel synergétique, comparable à ces innovations qui révèlent des champs d’usages imprévisibles quand elles ont été conçues.
Une capacité ODD réalisée est un actif ODD intangible qui peut figurer au poste des immobilisations ou au capital social quand il s’agit d’une valeur centrale et permanente pour l’organisation. Les actifs sont amortis sur la durée de leur utilisation prévue qui peut être extrêmement longue. Toutefois pour ne pas se limiter à une approche consumériste de la gestion d’actifs, il sera important d’introduire une représentation contradictoire de la gestion des valeurs au bilan dans laquelle l’amortissement de la valeur (dépréciation constatée au passif) devra être nécessairement contrebalancée par un amortissement inversé de la valeur (appréciation constatée à l’actif) afin de financer toutes les dépenses de rénovation et d’entretien. Dans cette perspective de responsabilité écologique qui vise à renouveler de la notion d’amortissement, les agents sont plus incités à entretenir et à préserver les actifs qu’à les consommer ou les déprécier.
Comparaison des écritures comptables pour la monétisation des investissements ODD dans les économies disjonctives et conjonctives :
Formation des employés :
Economie disjonctive : Actif : Formation employés +10,000 EUR |Passif : Liquidités +10,000 EUR
Economie conjonctive : Actif : Formation employés 10,000 EUR | Passif : Liquidités : 1*10^-4 EUR
Projets d’aménagements environnementaux :
Economie disjonctive : Actif : Aménagement Env — 500,000 EUR |Passif : Liquidités +500,000 EUR
Economie conjonctive : Actif : Aménagement Env 500,000 EUR | Passif : Liquidités : 2*10^-5 EUR
Cycle de vie des produits :
Economie disjonctive : Actif : Cycle produits –2,000,000 EUR |Passif : Liquidités +2,000,000 EUR
Economie conjonctive : Actif : Cycle produits 2,000,000 EUR | Passif : Liquidités : 5*10^-7 EUR
La monétisation des actifs dans l’économie conjonctive permet de valoriser les besoins fondamentaux et de les transformer en ressources financières utilisables pour atteindre des objectifs de développement durable. Les capitaux propres circulaires émergent de cette interaction dynamique, reflétant la capacité d’une organisation à promouvoir un cycle bénéfique et durable de développement économique et de bien-être communautaire.
Ainsi, la relation entre la monétisation des actifs et les capitaux propres circulaires réside dans la capacité des organisations à utiliser les actifs monétisés pour créer de la valeur durable et à long terme, tout en maintenant un équilibre entre l’amortissement et la valorisation des ressources. Tous les ODD tels que la santé ou l’éducation sont valorisables au bilan comme capitaux propres circulaires si la ressource financière qui est utilisée est équilibrée avec la valeur réellement produite et constatée lors de la réalisation des objectifs que l’on se donne.
Quinzième balance trinitaire : excédents ≡ déficits
L’économie disjonctives est une économie du gaspillage et du déséquilibre qui d’un côté réalise des excédents qu’elle détruit ou concentre, et d’un autre côté réalise des déficits qu’elle cache ou rejette dans l’environnement. Sa difficulté à trouver un équilibre dynamique provient du fait que la plupart des agents cherchent à maximiser leurs excédents et à minimiser leurs déficits séparément et sans cohérence. La construction d’une balance ternaire excédents-bénéfices aurait pour objectif d’organiser un marché structuré des réciprocités de ressources et de disponibilités par lequel ceux qui ont des excédents se mettent en rapport avec ceux qui ont des déficits de même nature. Dans cette perspective unitaire, l’économie conjonctive recherche une meilleure allocation des ressources et des emplois.
Une fois encore il s’agit de bien comprendre que l’objectif ici n’est pas de maximiser telle ou telle variable mais de créer les conditions d’une démarche globale de réciprocité dont le but est le bien commun.
La balance trinitaire de compensation de nos déficits et de nos excédents ne fonctionnera réellement que lorsque les personnes auront pris conscience qu’il existe une énergie qui est supérieure à toutes les énergies du monde, c’est celle d’une société organisée dans laquelle un accord a été trouvé pour faire prévaloir l’unicité des comportements sur la disparité des comportements. Dans cette compréhension élargie où les mathématiques ne sont plus conçues seulement comme des outils de gestion comptable des choses mais comme des instruments au service de l’expression des valeurs des êtres vivants, la bienveillance sera élevée au rang de vertu majeure dans la réflexion comme dans l’action qui porte au monde l’énergie mobilisée et éveillée de la communauté humaine.
Balances non contradictoires excédents — déficits
Il existe deux formes non contradictoires de relations comptables dans lesquelles on oppose les créances et les dettes en tentant de les soustraire les unes aux autres afin de créer de la valeur par leur différence. Il s’agit de deux modèles politiques basés sur la compétition (pour un utilitarisme pur) et de l’assistance (pour une équité sans contrepartie).
Tout système comptable qui vise à maximiser les créances et à minimiser les dettes est un système comptable fondé sur une relation de compétition.
Effet : Faire moins avec plus
Tout système comptable qui vise à maximiser les dettes et à minimiser les créances est un système comptable fondé sur une relation d’assistance.
Effet : Faire moins avec moins
Ces deux formes non contradictoires de relations comptables sont à l’origine des deux rapports d’échanges structurellement déséquilibrés qui prédominent aujourd’hui avec tous les problèmes que l’on connaît. En effet, la compétition repose sur une logique de la recette et de l’excédent, tandis que l’assistance est une logique de la dépense et du déficit.
Dans notre analyse de la structure comptable, l’économie de l’assistance qui culmine avec l’avènement de l’Etat-Providence est le double symétrique et maléfique de l’ultra-libéralisme de la prédation et de la compétition.
Balances contradictoires excédents — déficits
Il existe deux formes contradictoires de relations comptables dans lesquelles les créances et les dettes sont jugées comme des équivalences au regard de l’objectif supérieur d’équilibre : on parle bien entendu d’un équilibre de proportions et pas de quantités. Et comme par magie, on aboutit à la codification de deux modèles économiques et sociaux complémentaires basés sur la réciprocité : la coopération et le mutualisme.
Tout système comptable qui vise à maximiser les dettes et à maximiser les créances est un système comptable fondé sur une relation de coopération.
Effet : Faire plus avec plus
Tout système comptable qui vise à minimiser les créances et à minimiser les dettes est un système comptable fondé sur une relation de mutualisme.
Effet : Faire plus avec moins
En réalité, cette définition comptable du mutualisme correspond trait pour trait aux institutions de règlement monétaire international dont on a beaucoup discuté après la seconde guerre mondiale lors de la conférence de Bretton Woods consécutive à la proposition de John Maynard Keynes concernant une chambre de compensation internationale.
Dans le même ordre d’idée, nous citerons un autre grand économiste, Fritz Schumacher, qui nous dit :
« On ne peut avoir un système économique en paix tant qu’un ou plusieurs pays ont une balance à l’exportation durablement excédentaire, parce que cela maintient le reste du monde dans une situation débitrice sans fin… C’est sur ce point que la coopération internationale doit intervenir… On croit que c’est avoir une politique prudente que d’avoir des excédents à l’exportation, de dépenser moins que ce que l’on gagne… Mais l’excédent d’une nation correspond au déficit d’une autre. Tous les pays veulent gagner plus que ce qu’ils ne dépensent, c’est comme s’ils voulaient la lune. La détermination de chacun ne peut qu’aboutir au conflit avec les autres. Le commerce international est devenu une lutte imbécile pour gagner plus, additionnée de tensions politiques et de guerres. Le jour où l’ordre aura pris le pas sur le chaos dans les relations économiques internationales, je pense que l’humanité sera libérée du fléau de la guerre ».
Plus loin, l’économiste ajoute : « Nous devrions aller dans le sens d’une répartition internationale du travail qui soit plus raisonnable. Au lieu de creuser le déséquilibre entre la production des matières premières et celle des produits manufacturés, le développement pourrait être dirigé dans le sens de rétablir cet équilibre de la plus haute importance. Cela demanderait un bon mélange d’égoïsme et d’altruisme de la part des pays développés, un mélange qui est plus difficile à réaliser que de se réfugier dans l’égoïsme pur ou dans les croisades altruistes et humanitaires ». Ce mélange d’égoïsme et d’altruisme définit parfaitement l’équilibre contradictoire nécessaire pour atteindre l’état de réciprocité.
Dans une telle perspective, tout mécanisme comptable ou financier qui vise à maintenir l’équilibre contradictoire de la balance des paiements entre tous les agents inégaux mériterait le nom de système de réciprocité.
Réciprocité dans laquelle on reconnait à chacun la capacité à donner et recevoir, acheter et vendre, exprimer et posséder, matériellement et symboliquement, intellectuellement et affectivement… ce qui pourrait constituer une définition de la participation à la communauté humaine au sens multidimensionnel, singulier et universel du terme.
Les échanges trinitaires de l’économie conjonctive
Afin de développer une intelligence juridique et économique permettant de reconnecter avec le développement durable, nous allons différencier deux types d’échanges : l’échange disjonctif et l’échange conjonctif.
L’échange disjonctif (fonction OU EXCLUSIF) organise une simple transaction entre des parties qui, en principe, n’entretiendront aucun lien significatif après l’échange des consentements et l’exécution des obligations. Pour Macneil, dans une transaction commerciale à dimension exclusivement matérielle, les parties procèdent à un échange décontextualisé sans égard à leur identité respective, c’est « l’union spontanée et instantanée » de deux volontés abstraites, qui se rencontrent dans un « coup de foudre » sans songer à bâtir un avenir commun. Ainsi en est-il du contrat de vente avec exécution instantanée survenant lors d’échanges ponctuels : le transfert de la propriété de la chose commune s’opère de manière immédiate et en principe irrémédiable au moment même où une somme d’argent est payée en échange. Selon Macneil, l’archétype de l’échange matériel est l’accord conclu « on the spot » et dans un « one shot », à l’instar du contrat de vente d’une chose commune, comme de l’essence à une pompe.
A l’inverse, l’échange conjonctif (fonction EQUIVALENCE) suppose un projet de coopération et s’échelonne dans le temps, souvent pour une durée indéterminée. Les parties à un tel échange ne sont pas les créanciers et débiteurs d’un objet prédéterminé, mais apparaissent comme des partenaires dont les intérêts ne sont pas définitivement fixés à l’entame de la relation, mais peuvent évoluer en fonction des circonstances survenant au cours de celle-ci. Pour ces partenaires, la réussite du projet commun prime sur d’autres considérations à court terme et l’ajustement des prestations respectives au profit de la réalisation de l’objectif partagé l’emporte en principe sur le contenu des obligations prévues de manière abstraite au départ. Alors que l’échange disjonctif est impersonnel, l’échange conjonctif, sans être nécessairement intuitu personae, suppose un engagement des partenaires, donc une forme de coopération qui valorise le développement du partenariat autant que l’objet de la relation. L’ouverture sur le futur et la perspective d’une collaboration façonnent la manière dont les relations se développent. Dans l’échange disjonctif, la poursuite des intérêts privés converge spontanément autour de l’échange ; dans l’échange conjonctif, la relation vise à créer une véritable communauté d’intérêts par ajustement des attentes. La communication dans ce second mode d’échange est plus approfondie et implique le partage d’attentes et préférences plus subjectives, alors qu’elle se limite à la transmission d’informations objectives (précontractuelles, éventuellement en cours d’exécution) dans le modèle de l’échange matériel. Le contexte est déterminant dans l’échange relationnel, alors que le texte (ou la lettre) du contrat joue un rôle plus important dans l’échange matériel. Le premier vise avant tout à planifier la relation qui doit se déployer à l’avenir, le second entend garantir le respect d’un accord passé. De multiples normes non juridiques guident les ajustements dans la relation à long terme qui se fonde sur la confirmation continue de la confiance entre partenaires, alors que la norme juridique est centrale en cas d’échange strictement matériel.
En définitive, l’inscription dans la durée et les interactions entre partenaires, mais aussi les aléas liés à celles-ci, sont caractéristiques du contrat conjonctif qui se bâtit sur la dimension relationnelle, alors que le contrat disjonctif ne se base que sur les choses matérielles. Tandis que l’échange disjonctif repose sur un échange ponctuel des consentements et l’exécution simultanée ou à tout le moins rapide et programmée des obligations, l’échange conjonctif suppose une relation qui se déploie dans le temps entre des parties qui apparaissent comme des partenaires unis par leur confiance autour d’un projet commun.
L’aspect conjonctif (ou relationnel) et disjonctif (ou matériel) que nous avons différencié dans cette présentation sont sans doute inhérents à tout contrat. Mais ils seront plus ou moins accentués selon que l’échange se rapproche du modèle matériel ou du modèle relationnel. Dans le cas qui nous concerne, le fait que le partage du droit d’usage monétaire repose sur un graphe de transaction équilibré qui permet de représenter l’ensemble des relations monétaires des agents sous la forme d’arc orientés et pondérés et leur permet de s’affranchir à la fois des obligations de détention préalable de trésorerie personnelle et des obligations terminales de rentabilité apporte des éléments décisifs qui font pencher le contrat vers une forme d’échange plus relationnelle que matérielle. La dimension relationnelle est particulièrement forte dans l’obligation faite aux agents d’égaliser les flux entrants et sortants dans leurs échanges, car une telle contrainte aboutit à une gestion reliée des créances et des dettes, des ressources et des emplois, des dépenses et des recettes qui met un terme à la gestion séparée et opposée des flux entrants et sortants qui prévaut dans le modèle matériel de la comptabilité en partie double. Une telle contrainte instaure de facto un rapport de solidarité entre les agents qui va leur apporter des garanties sur la stabilité et la pérennité du système d’échange auquel ils participent, ce qui signifie paradoxalement que c’est au moyen d’une contrainte supplémentaire sur le système d’échange que l’on maximise la capacité des agents.
Pour comprendre la diversité des échanges concrets, on peut opposer deux idéaux-types au sens de Max Weber, à savoir deux catégories théoriques qui ne se retrouvent jamais intégralement dans la pratique, mais à la lumière desquelles on peut étalonner l’analyse des échanges empiriques. Reprenant pour partie le travail de synthèse réalisé par Catherine Delforge à partir des pôles matériel et relationnel, le tableau ci-dessous le complète pour décrire deux types abstraits appelés le contrat-obligation et le contrat-relation.
La conversion d’activités de nature disjonctive en activités de nature conjonctive peut se réaliser en suivant une méthode structurée qui encourage la coopération, l’inclusion, et la création de valeur partagée. Voici quelques exemples pratiques et une méthode détaillée pour effectuer cette conversion :
Exemples Pratiques
- Contractualisation dans les relations fournisseurs-clients :
- Disjonctif : Un fournisseur livre des produits à un client selon un contrat strict avec des termes précis de livraison et de paiement sans interaction continue.
- Conjonctif : Transformez cette relation en un partenariat stratégique où le fournisseur et le client collaborent pour optimiser la chaîne d’approvisionnement, améliorer les produits, et partager des informations de marché. Cela pourrait inclure des réunions régulières, des projets de co-développement, et des systèmes de partage de profits basés sur les performances conjointes.
2. Gestion de projets internes dans une entreprise :
- Disjonctif : Les départements travaillent de manière indépendante avec des objectifs et des délais stricts, souvent sans coordination interdépartementale.
- Conjonctif : Établissez des équipes de projet interfonctionnelles où les membres des différents départements collaborent pour atteindre des objectifs communs. Organisez des séances de brainstorming, des ateliers de co-création, et des systèmes de feedback continu pour favoriser la synergie.
3. Engagement communautaire d’une entreprise :
- Disjonctif : L’entreprise réalise des dons ponctuels à des organisations caritatives sans suivi ou interaction ultérieure.
- Conjonctif : Initiez des programmes de responsabilité sociale d’entreprise (RSE) où l’entreprise collabore avec des communautés locales pour des projets à long terme. Par exemple, des programmes d’éducation continue, des initiatives environnementales, et des projets d’infrastructure communautaire.
Autres Exemples de Conversion d’Activités Disjonctives en Activités Conjonctives
4. Service client dans une entreprise :
- Disjonctif : Le service client traite les plaintes et les demandes des clients de manière isolée, avec des réponses standardisées et sans suivi personnalisé.
- Conjonctif : Transformez le service client en une relation continue où les agents suivent les clients de manière proactive, offrent des solutions personnalisées et recueillent régulièrement des feedbacks pour améliorer les produits et services. Par exemple, mettre en place un programme de fidélisation qui inclut des suivis réguliers, des offres personnalisées et des événements exclusifs pour les clients fidèles.
5. Éducation et formation :
- Disjonctif : Les étudiants suivent des cours isolés avec peu d’interaction entre eux et sans application pratique continue des connaissances.
- Conjonctif : Introduisez des projets collaboratifs et des apprentissages par projet où les étudiants travaillent en équipe sur des problèmes réels tout au long de leur cursus. Intégrez des stages, des ateliers pratiques et des partenariats avec des entreprises pour une application concrète et continue des connaissances acquises.
6. Gestion des ressources humaines :
- Disjonctif : Les employés sont évalués annuellement sans interaction continue et avec des objectifs individuels stricts.
- Conjonctif : Mettez en place un système de gestion des performances continue avec des feedbacks réguliers, des évaluations à 360 degrés, et des objectifs de développement personnels et d’équipe. Encouragez les employés à participer à des groupes de travail inter-départements et à des projets transversaux pour favoriser la collaboration et le développement des compétences.
7. Marketing et publicité :
- Disjonctif : Les campagnes marketing sont lancées ponctuellement sans suivi ni interaction continue avec les clients.
- Conjonctif : Adoptez une approche de marketing relationnel où l’interaction avec les clients est continue à travers les réseaux sociaux, les newsletters, et les programmes de fidélisation. Utilisez les données clients pour personnaliser les campagnes et créer des expériences de marque engageantes et interactives.
8. Développement de produits :
- Disjonctif : Les produits sont développés en interne et lancés sur le marché sans retour continu des utilisateurs.
- Conjonctif : Impliquez les clients et les utilisateurs finaux dans le processus de développement à travers des plateformes de cocréation et des groupes de discussion. Utilisez des cycles de développement itératifs avec des tests utilisateurs réguliers et des ajustements basés sur les retours pour créer des produits qui répondent mieux aux besoins des clients.
Exemples d’activités basées sur la coopération
1 . Co-intervenir :
- Définition : Intervenir ensemble dans une situation, souvent pour résoudre un problème ou apporter une aide.
- Exemple : Les médecins et les infirmières ont co-intervenu pour stabiliser le patient en urgence.
2. Co-présenter :
- Définition : Présenter ensemble un programme, un événement ou un projet.
- Exemple : Les deux animateurs ont co-présenté la conférence sur les nouvelles technologies.
3. Co-définir :
- Définition : Définir ensemble des termes, des conditions ou des objectifs.
- Exemple : Les membres de l’équipe ont co-défini les objectifs du projet pour s’assurer d’une compréhension commune.
4. Co-évoluer :
- Définition : Évoluer ensemble en s’adaptant mutuellement aux changements.
- Exemple : Les deux espèces ont co-évolué au fil du temps, développant des relations symbiotiques.
5. Co-financer :
- Définition : Financer ensemble un projet, souvent par plusieurs parties prenantes.
- Exemple : Les entreprises locales ont co-financé la construction du nouveau centre communautaire.
6. Co-encadrer :
- Définition : Encadrer ensemble une activité, un groupe ou un projet.
- Exemple : Les deux professeurs ont co-encadré le groupe d’étudiants pour leur projet de fin d’études.
7. Co-décider :
- Définition : Prendre des décisions ensemble, en concertation.
- Exemple : Les membres du conseil d’administration ont co-décidé des nouvelles orientations stratégiques de l’entreprise.
8. Co-planifier :
- Définition : Planifier ensemble des activités, des projets ou des événements.
- Exemple : Les responsables des différents départements ont co-planifié les étapes du lancement du nouveau produit.
9. Co-enseigner :
- Définition : Enseigner ensemble un cours ou une matière.
- Exemple : Les deux professeurs ont co-enseigné le séminaire sur les droits de l’homme.
10. Co-investir :
- Définition : Investir ensemble dans un projet, une entreprise ou un fonds.
- Exemple : Les partenaires ont co-investi dans une start-up innovante.
11. Co-innover :
- Définition : Innover ensemble en développant de nouvelles idées, produits ou services.
- Exemple : Les équipes de recherche ont co-innové pour créer une technologie révolutionnaire.
12. Co-héberger :
- Définition : Héberger ensemble ou partager l’hébergement de personnes, événements ou services.
- Exemple : Les deux familles ont co-hébergé les invités lors de la fête de quartier.
13. Co-piloter :
- Définition : Piloter ensemble un projet, une activité ou un véhicule.
- Exemple : Les deux ingénieurs ont co-piloté le projet de développement du nouveau logiciel.
14. Co-diffuser :
- Définition : Diffuser ensemble un contenu, une émission ou un message.
- Exemple : Les chaînes de télévision ont co-diffusé le documentaire sur la biodiversité.
15. Co-analyser :
- Définition : Analyser ensemble des données, des situations ou des problèmes.
- Exemple : Les scientifiques ont co-analysé les résultats des expériences pour tirer des conclusions communes.
16. Co-administrer :
- Définition : Administrer ensemble une organisation, un système ou des médicaments.
- Exemple : Les deux gestionnaires ont co-administré l’association pour en améliorer l’efficacité.
17. Co-développer :
- Définition : Développer ensemble un produit, un logiciel ou une compétence.
- Exemple : Les équipes techniques ont co-développé une application mobile innovante.
18. Co-modérer :
- Définition : Modérer ensemble une discussion, un forum ou un débat.
- Exemple : Les deux experts ont co-modéré le débat sur les énergies renouvelables.
19. Co-imaginer :
- Définition : Imaginer ensemble des concepts, des projets ou des solutions.
- Exemple : Les designers ont co-imaginé une nouvelle collection de meubles écologiques.
20. Co-partager :
- Définition : Partager ensemble des ressources, des espaces ou des informations.
- Exemple : Les collègues ont co-partagé leurs bureaux pour favoriser la collaboration.
21. Co-travailler :
- Définition : Travailler ensemble sur des projets ou des tâches.
- Exemple : Les freelances ont co-travaillé dans un espace de coworking pour stimuler leur créativité.
22. Co-signaler :
- Définition : Signaler ensemble un problème ou une anomalie.
- Exemple : Les utilisateurs ont co-signaler les bugs de l’application pour accélérer les corrections.
23. Co-réaliser :
- Définition : Réaliser ensemble un film, un projet ou une initiative.
- Exemple : Les réalisateurs ont co-réalisé un film primé au festival de Cannes.
24. Co-organiser :
- Définition : Organiser ensemble un événement, une activité ou un projet.
- Exemple : Les deux entreprises ont co-organisé une conférence sur l’innovation technologique.
25. Co-évaluer :
- Définition : Évaluer ensemble une performance, un projet ou un candidat.
- Exemple : Les enseignants ont co-évalué les projets des étudiants pour garantir une notation équitable.
26. Co-financer :
- Définition : Financer ensemble un projet ou une entreprise.
- Exemple : Les investisseurs ont co-financé la construction du nouvel hôpital.
27. Co-cultiver :
- Définition : Cultiver ensemble des plantes, des idées ou des compétences.
- Exemple : Les agriculteurs ont co-cultivé des variétés de légumes pour diversifier leur production.
28. Co-habiter :
- Définition : Habiter ensemble dans un même lieu.
- Exemple : Les étudiants ont co-habité dans une maison pour partager les frais et vivre en communauté.
29. Co-faciliter :
- Définition : Faciliter ensemble des réunions, des ateliers ou des formations.
- Exemple : Les formateurs ont co-facilité l’atelier de développement personnel.
30. Co-initier :
- Définition : Initier ensemble un projet, une action ou une initiative.
- Exemple : Les deux organisations ont co-initié une campagne de sensibilisation à l’environnement.
31. Co-déterminer :
- Définition : Déterminer ensemble des critères, des objectifs ou des actions.
- Exemple : Les partenaires sociaux ont co-déterminé les critères de sélection pour les nouvelles recrues.
32. Co-rédiger :
- Définition : Rédiger ensemble un document, un rapport ou un article.
- Exemple : Les experts ont co-rédigé un rapport sur les politiques climatiques.
33. Co-négocier :
- Définition : Négocier ensemble des termes, des conditions ou des accords.
- Exemple : Les syndicats et la direction ont co-négocié les nouvelles conditions de travail.
34. Co-préparer :
- Définition : Préparer ensemble une activité, un événement ou un projet.
- Exemple : Les élèves ont co-préparé la présentation pour la fête de l’école.
35. Co-responsabiliser :
- Définition : Partager ensemble la responsabilité d’une tâche ou d’un projet.
- Exemple : Les membres de l’équipe sont co-responsabilisés pour la réussite de la mission.
36. Co-créer :
- Définition : Créer ensemble quelque chose, comme un produit, une œuvre ou une idée.
- Exemple : Les artistes ont co-créé une installation interactive pour le festival d’art.
37. Co-déployer :
- Définition : Déployer ensemble des ressources, des stratégies ou des initiatives.
- Exemple : Les équipes ont co-déployé les nouvelles politiques de sécurité dans l’entreprise.
38. Co-encadrer :
- Définition : Encadrer ensemble un projet, une équipe ou une activité.
- Exemple : Les deux mentors ont co-encadré les jeunes entrepreneurs dans le programme d’incubation.
39. Co-parrainer :
- Définition : Parrainer ensemble une initiative, un projet ou une personne.
- Exemple : Les entreprises ont co-parrainé le programme de bourses pour les étudiants défavorisés.
40. Co-implémenter :
- Définition : Mettre en œuvre ensemble des solutions, des systèmes ou des projets.
- Exemple : Les développeurs ont co-implémenté le nouveau logiciel de gestion.
41. Co-manifester :
- Définition : Manifester ensemble pour soutenir une cause ou une revendication.
- Exemple : Les citoyens ont co-manifesté pour demander des actions contre le changement climatique.
42. Co-élever :
- Définition : Élever ensemble des enfants ou des animaux.
- Exemple : Les parents ont co-élevé leurs enfants en partageant équitablement les responsabilités familiales.
43. Co-instruire :
- Définition : Instruire ensemble des personnes ou des groupes.
- Exemple : Les professeurs ont co-instruit la classe sur les techniques de résolution de problèmes.
44. Co-programmer :
- Définition : Programmer ensemble des activités, des événements ou des logiciels.
- Exemple : Les développeurs ont co-programmé l’application pour améliorer son efficacité.
45. Co-concevoir :
- Définition : Concevoir ensemble des produits, des services ou des projets.
- Exemple : Les designers ont co-conçu une nouvelle gamme de meubles éco-responsables.
46. Co-discuter :
- Définition : Discuter ensemble pour échanger des idées ou prendre des décisions.
- Exemple : Les partenaires ont co-discuté des stratégies à adopter pour le développement du projet.
47. Co-réfléchir :
- Définition : Réfléchir ensemble pour trouver des solutions ou générer des idées.
- Exemple : Les chercheurs ont co-réfléchi aux moyens de réduire l’empreinte carbone des bâtiments.
48. Co-examiner :
- Définition : Examiner ensemble des faits, des données ou des cas.
- Exemple : Les médecins ont co-examiné les résultats des tests pour établir un diagnostic précis.
49. Co-orchestrer :
- Définition : Orchestrer ensemble des activités, des événements ou des processus.
- Exemple : Les directeurs ont co-orchestré le déploiement de la nouvelle stratégie marketing.
50. Co-signer :
- Définition : Signer ensemble un document, un contrat ou une lettre.
- Exemple : Les deux parties ont co-signé l’accord de partenariat.
51. Co-exploiter :
- Définition : Exploiter ensemble des ressources, des technologies ou des opportunités.
- Exemple : Les entreprises ont co-exploité une mine de lithium pour augmenter leur production.
52. Co-analyser :
- Définition : Analyser ensemble des informations, des situations ou des résultats.
- Exemple : Les économistes ont co-analysé les données de marché pour prédire les tendances futures.
53. Co-représenter :
- Définition : Représenter ensemble une organisation, un groupe ou une cause.
- Exemple : Les avocats ont co-représenté les intérêts des travailleurs dans le procès.
54. Co-ordonner :
- Définition : Ordonner ou structurer ensemble des activités ou des processus.
- Exemple : Les gestionnaires ont co-ordonné les tâches pour assurer une meilleure efficacité.
55. Co-discipliner :
- Définition : Discipliner ensemble un groupe ou une équipe.
- Exemple : Les entraîneurs ont co-discipliné les athlètes pour maintenir une bonne performance.
56. Co-assumer :
- Définition : Assumer ensemble des responsabilités ou des rôles.
- Exemple : Les co-fondateurs ont co-assumé les décisions stratégiques de l’entreprise.
57. Co-parler :
- Définition : Parler ensemble pour échanger des idées ou des informations.
- Exemple : Les dirigeants ont co-parlé pour élaborer une nouvelle politique interne.
58. Co-construire :
- Définition : Construire ensemble un projet, une idée ou une infrastructure.
- Exemple : Les habitants ont co-construit une aire de jeux communautaire pour les enfants.
59. Co-organiser :
- Définition : Organiser ensemble un événement, une activité ou un projet.
- Exemple : Les deux associations ont co-organisé un festival de musique.
60. Co-médiatiser :
- Définition : Médiatiser ensemble un événement ou une cause.
- Exemple : Les journalistes ont co-médiatisé la campagne de sensibilisation à la santé mentale.
61. Co-livrer :
- Définition : Livrer ensemble des produits ou des services.
- Exemple : Les entreprises de logistique ont co-livré les fournitures aux zones sinistrées.
62. Co-inviter :
- Définition : Inviter ensemble des personnes à un événement ou une réunion.
- Exemple : Les organisateurs ont co-invité des experts internationaux pour la conférence.
63. Co-rechercher :
- Définition : Rechercher ensemble des informations, des solutions ou des innovations.
- Exemple : Les scientifiques ont co-recherché des traitements pour une maladie rare.
64. Co-actualiser :
- Définition : Actualiser ensemble des informations ou des données.
- Exemple : Les analystes ont co-actualisé les bases de données pour refléter les nouvelles informations du marché.
65. Co-consulter :
- Définition : Consulter ensemble des experts ou des ressources.
- Exemple : Les gestionnaires ont co-consulté des experts pour élaborer la stratégie de développement durable.
66. Co-finir :
- Définition : Terminer ensemble une tâche ou un projet.
- Exemple : Les équipes ont co-fini le rapport avant la date limite.
67. Co-apprendre :
- Définition : Apprendre ensemble, souvent dans un cadre collaboratif.
- Exemple : Les étudiants ont co-appris les concepts de programmation lors des séances de tutorat.
68. Co-inspirer :
- Définition : Inspirer ensemble des idées ou des actions.
- Exemple : Les leaders ont co-inspiré leur équipe à atteindre de nouveaux
L’échange transitif et les contrats d’entiercement
Comment pourrait-on utiliser l’échange transitif pour financer des biens publics et des ODD ? Et pour le distinguer d’un échange marchand commutatif, ne pourrait-pas dire qu’il recherche non pas le bien de la deuxième personne de l’échange (le partenaire, le client… etc) mais le bien d’une personne tierce (l’environnement, la société, les femmes au sens large, les pauvres au sens des ODD) ? Au lieu d’un contrat classique d’achat ou de vente bilatéral, ne pourrait-on pas imaginer un contrat d’entiercement ? Quel sens aurait-il et quelles opérations permettrait-il de réaliser par exemple en faveur de la réalisation des ODD ?
Concept de l’échange transitif
Définition : Un échange transitif est un échange où l’objectif principal est de bénéficier à une tierce partie (entité C) à travers un accord entre deux parties initiales (entité A et entité B).
Contrat d’entiercement pour les ODD
Définition : Un contrat d’entiercement dans ce contexte est un accord où les parties A et B réalisent des transactions ou des échanges avec l’objectif de fournir un bénéfice direct à la tierce partie C, qui est l’entité bénéficiaire.
Exemple de fonctionnement
- Parties impliquées :
- Entreprise A : Fournit des fonds ou des ressources.
- Organisation B : Fournit un produit ou un service en échange des fonds ou ressources.
- Entité C (Bénéficiaire) : Reçoit les bénéfices indirects du contrat d’échange.
- Processus :
- Étape 1 : L’entreprise A engage des fonds ou des ressources auprès de l’organisation B avec une stipulation que les bénéfices de cet échange seront dirigés vers l’entité C.
- Étape 2 : L’organisation B utilise les fonds ou les ressources pour fournir des services ou des produits qui directement ou indirectement profitent à l’entité C.
- Étape 3 : L’entité C bénéficie des produits ou services fournis par l’organisation B grâce aux fonds ou ressources alloués par l’entreprise A.
Avantages de l’échange transitif et du contrat d’entiercement
- Impact direct sur les bénéficiaires :
- Ce modèle assure que les ressources ou fonds alloués profitent directement à des bénéficiaires spécifiques, alignés avec les ODD.
2. Attraction d’investissements sociaux :
- Les entreprises peuvent être plus enclines à investir dans des projets ayant un impact social ou environnemental positif, sachant que leur contribution bénéficiera directement à une cause spécifique.
3. Alignement avec les objectifs de développement durable :
- Les échanges sont structurés de manière à répondre directement aux besoins des ODD, comme la réduction de la pauvreté, l’amélioration de l’éducation, et la protection de l’environnement.
Exemples pratiques d’opérations
- Projets environnementaux :
- Une entreprise A finance des panneaux solaires auprès d’un fournisseur B, avec l’accord que ces panneaux seront installés dans des villages reculés (entité C) pour fournir de l’énergie propre.
2. Éducation et formation :
- Une entreprise A finance un programme de formation dispensé par une organisation B. Les formations sont destinées à des femmes dans des communautés défavorisées (entité C) pour améliorer leur accès à l’emploi et à l’éducation.
3. Santé publique :
- Une entreprise pharmaceutique A fournit des fonds à une organisation B pour acheter et distribuer des médicaments essentiels dans des régions touchées par des maladies (entité C).
Conclusion
L’échange transitif, en utilisant des contrats d’entiercement où l’entité bénéficiaire est directement impliquée, peut être une méthode innovante pour financer des projets en faveur des biens publics et des ODD. Cela permet d’assurer que les ressources allouées sont effectivement utilisées pour créer un impact positif direct sur les bénéficiaires désignés, renforçant ainsi la confiance et l’engagement des parties prenantes dans des initiatives de développement durable.
L’échange transitif et la structuration des marchés
Echange transitif : Un échange est considéré comme juste quand chaque terme est échangeable contre un même troisième, selon le principe que deux quantités égales à une troisième sont égales entre elles. Les conditions de réalisation de l’échange transitif ne seraient-elles pas grandement facilitées si l’on convenait que les marchés soient plus structurés en catégories dans lesquelles les personnes échangent des produits et services qui ont exactement la même valeur ou le même prix ? Qu’est-ce que cela apporterait de plus en terme d’organisation ?
Structurer les marchés en catégories où les produits et services échangés ont exactement la même valeur ou le même prix peut effectivement faciliter les échanges transitifs et apporter plusieurs avantages en termes d’organisation. Voici une analyse de cette approche et de ses implications potentielles :
Avantages de la structuration des marchés en catégories de valeur égale
- Facilitation des échanges transitifs
- Simplicité des transactions : Lorsque les produits et services dans une catégorie ont des valeurs ou des prix identiques, il est plus facile de réaliser des échanges transitifs, car chaque terme est facilement comparable à un troisième terme standardisé.
- Transparence : Les parties savent immédiatement que les échanges dans une catégorie donnée sont équitables sans avoir besoin d’évaluations ou de négociations complexes.
2. Équité et justice des échanges
- Égalité des parties : En standardisant les valeurs dans des catégories spécifiques, on réduit les inégalités potentielles entre les parties prenantes, assurant que chaque échange est perçu comme juste et équitable.
- Prédictibilité : Les participants au marché peuvent prédire avec plus de certitude les résultats des échanges, ce qui augmente la confiance et la participation.
3. Réduction des coûts de transaction
- Moins de négociations : La standardisation des valeurs ou des prix dans des catégories spécifiques élimine la nécessité de négociations prolongées sur les prix, réduisant ainsi les coûts de transaction.
- Moins d’évaluations : Les parties n’ont pas besoin d’évaluer chaque bien ou service de manière exhaustive, ce qui économise du temps et des ressources.
4. Efficacité du Marché
- Fluidité des échanges : Les échanges peuvent se dérouler plus rapidement et plus efficacement lorsque les produits et services sont regroupés en catégories de valeur égale.
- Standardisation : La standardisation favorise la liquidité du marché en augmentant le nombre d’échanges possibles dans une catégorie donnée.
5. Facilitation de la planification et de la gestion
- Planification simplifiée : Pour les entreprises et les gouvernements, la planification et la gestion des ressources deviennent plus simples avec des catégories de valeur standardisée.
- Politiques claires : Les régulateurs peuvent élaborer des politiques plus claires et plus cohérentes pour les différentes catégories de produits et services.
Inconvénients et limites potentielles
- Diversité des produits et services
- Perte de flexibilité : La standardisation rigide pourrait ne pas tenir compte de la diversité et des nuances des produits et services, limitant ainsi la flexibilité et l’innovation.
- Complexité de classification : Classifier précisément chaque produit ou service dans une catégorie de valeur spécifique peut être complexe et sujet à des erreurs ou des désaccords.
2. Marchés de niche
- Marchés de niche et spécialisés : Certains marchés de niche pourraient être désavantagés par une standardisation excessive, car leurs produits ou services peuvent avoir des valeurs fluctuantes ou spécifiques.
- Dynamique de l’offre et de la demande : Les valeurs des produits et services peuvent fluctuer en fonction de l’offre et de la demande, rendant une standardisation rigide difficile à maintenir.
3. Bureaucratisation
- Régulation excessive : Une trop grande régulation et structuration peuvent mener à une bureaucratisation, ralentissant les processus et réduisant l’efficacité.
- Rigidité réglementaire : Les règles rigides peuvent ne pas s’adapter rapidement aux changements du marché, rendant les échanges plus difficiles en périodes de changement économique rapide.
Conclusion
Structurer les marchés en catégories où les produits et services ont exactement la même valeur ou le même prix peut offrir des avantages significatifs en termes de facilitation des échanges transitifs, de réduction des coûts de transaction, et d’efficacité du marché. Cependant, il est crucial de trouver un équilibre entre standardisation et flexibilité pour tenir compte de la diversité des produits et services et des dynamiques de marché. Une approche équilibrée pourrait inclure :
- Catégories flexibles : Créer des catégories avec des plages de valeur plutôt que des valeurs fixes pour permettre une certaine flexibilité.
- Mécanismes d’ajustement : Mettre en place des mécanismes pour ajuster les catégories en fonction des évolutions du marché et des besoins des parties prenantes.
- Engagement des parties prenantes : Impliquer les parties prenantes dans la création et la gestion des catégories pour assurer qu’elles répondent aux besoins réels du marché.
Permettre à chaque personne de choisir la catégorie dans laquelle elle souhaite faire des transactions aurait le mérite de combiner la simplicité de la standardisation des valeurs avec la flexibilité nécessaire pour répondre aux besoins individuels. Cela simplifierait les échanges par troc, réduirait les coûts de transaction et la bureaucratisation liée à la centralisation, et faciliterait le financement des biens publics et des ODD, tout en maintenant une grande transparence et équité dans les échanges.
En adoptant une approche équilibrée, il est possible de tirer parti des avantages de la structuration tout en minimisant ses inconvénients.
Echange transitif et contrats ternaires
Les contrats ternaires sont des accords impliquant trois parties distinctes, chacun ayant des rôles et des responsabilités spécifiques.
Voici une liste de différents types de contrats ternaires couramment utilisés et qui peuvent être avantageux pour les tiers :
1. Contrat de fiducie (trust agreement)
- Parties : Fiduciaire (trustee), bénéficiaire (beneficiary), constituant (settlor)
- Avantages : Protection des actifs, planification successorale, gestion des biens pour le bénéfice des bénéficiaires.
2. Contrat de tiers bénéficiaire (third-party beneficiary contract)
- Parties : Promettant (promisor), bénéficiaire (beneficiary), promettant secondaire (promisee)
- Avantages : Le tiers bénéficiaire peut faire valoir ses droits en vertu du contrat même s’il n’est pas partie prenante au contrat initial.
3. Contrat de gérance (escrow agreement)
- Parties : Déposant (depositor), bénéficiaire (beneficiary), agent de dépôt (escrow agent)
- Avantages : Sécurité et impartialité dans la transaction, assurance que les conditions de l’accord seront respectées avant la libération des fonds ou des biens.
4. Contrat de garantie (guarantee agreement)
- Parties : Garant (guarantor), créancier (creditor), débiteur (debtor)
- Avantages : Assurance de paiement pour le créancier, accès à des fonds ou des services pour le débiteur même en cas de défaut.
5. Contrat de distribution (distribution agreement)
- Parties : Fabricant (manufacturer), distributeur (distributor), détaillant (retailer)
- Avantages : Élargissement du marché pour le fabricant, accès à un réseau de distribution pour le distributeur, offre de produits pour le détaillant.
6. Contrat de prise en charge (takeover agreement)
- Parties : Acheteur (buyer), vendeur (seller), garant (guarantor)
- Avantages : Sécurité pour l’acheteur que le vendeur recevra les paiements, sécurité pour le vendeur que les conditions de vente seront respectées.
7. Contrat de partenariat public-privé (PPP)
- Parties : Gouvernement (government), entreprise privée (private company), entité de financement (financing entity)
- Avantages : Partage des risques et des ressources, amélioration des infrastructures publiques, opportunités de rentabilité pour le secteur privé.
8. Contrat de sous-traitance (subcontract agreement)
- Parties : Contractant principal (main contractor), sous-traitant (subcontractor), client final (end client)
- Avantages : Répartition du travail spécialisé, efficacité accrue, réduction des coûts pour le client final.
9. Contrat de maintenance (maintenance agreement)
- Parties : Fournisseur de services (service provider), propriétaire de l’équipement (equipment owner), utilisateur final (end user)
- Avantages : Assurance de la performance de l’équipement, réduction des temps d’arrêt, satisfaction de l’utilisateur final.
10. Contrat de joint-venture (joint venture agreement)
- Parties : Partenaire A (Partner A), partenaire B (Partner B), coentreprise (joint venture)
- Avantages : Partage des ressources et des risques, accès à de nouveaux marchés, synergies opérationnelles.
11. Contrat de licence (license agreement)
- Parties : Concédant (licensor), licencié (licensee), utilisateur final (end user)
- Avantages : Monétisation des droits de propriété intellectuelle, accès à des technologies ou des produits pour le licencié, bénéfices pour l’utilisateur final.
12. Contrat d’assurance-crédit (credit insurance agreement)
- Parties : Assuré (insured), assureur (insurer), débiteur (debtor)
- Avantages : Protection contre les risques de non-paiement, facilitation des transactions commerciales, sécurisation des flux de trésorerie.
13. Contrat de leasing (leasing agreement)
- Parties : Bailleur (lessor), preneur (lessee), fournisseur de l’équipement (equipment provider)
- Avantages : Accès à l’équipement sans achat immédiat, répartition des coûts, flexibilité pour le preneur.
14. Contrat de financement participatif (crowdfunding agreement)
- Parties : Initiateur du projet (project initiator), plateforme de financement (funding platform), investisseurs (investors)
- Avantages : Accès au capital pour le projet, diversification des sources de financement, participation communautaire.
15. Contrat de recherche et développement (R&D agreement)
- Parties : Organisation de recherche (research organization), entreprise commanditaire (sponsoring company), bénéficiaire de la technologie (technology beneficiary)
- Avantages : Innovation et développement technologique, partage des coûts de R&D, accès aux résultats de la recherche pour les parties impliquées.
Ces contrats ternaires peuvent offrir des avantages significatifs aux tiers impliqués en assurant la sécurité, l’équité, et l’efficacité des transactions et des collaborations. Ils contribuent à l’apparition d’une économie conjonctive mettant en oeuvre une complexification des relations économiques liées au passage du rapport binaire au rapport ternaire.
Vers un marché des réciprocités
Au début, quand je réfléchissais à l’implémentation de ce nouvel échange, je voyais une unité commune pour tous (réseau centralisé). Dans cette vision, il y avait une unité de compte commune pour tout le monde et chaque personne pouvait l’utiliser pour créer de la capacité d’échange supplémentaire. Je me disais que cette base monétaire commune serait par exemple très utile pour créer une capacité d’échange distribuée, scalable, négociée et organisée pour toutes les dépenses périodiques et cycliques que les personnes font entre elles au niveau d’une ville ou d’un village.
Puis j’ai vu une unité pour chaque personne permettant à chacun de se connecter à tous (réseau décentralisé). Ca ressemble beaucoup à un réseau social de partage de valeur qui permettrait aux personnes de faire des choses ensemble. Ce réseau social serait un mélange de web.1 (trouver la bonne personne) ou chacun mettra son CV ou une lettre décrivant ses aspirations, de web.2 (trouver la bonne réponse) où chacun disposera d’un agent conversationnel qui pourrait être un chatbot ou une IA capable de le représenter, de discuter pour lui, d’échanger de l’information et de faire des propositions, de web.3 (partager de la valeur) où chacun pourrait utiliser son unité de base pour développer des relations chiffrées de réciprocité avec d’autres personnes souhaitant s’investir dans une même pratique sociale, et de web.4 (traiter de la valeur) où chacun disposera d’un instrument de décision collective basée sur le vote de préférence afin de pouvoir aboutir à l’adoption collective de propositions de valeurs dotées d’un haut niveau d’intérêt et d’acceptabilité liés aux conversations.
Enfin, quand ma vision est devenue de plus en plus précise et élaborée, j’ai vu que cette pratique ayant pour objet de créer de la capacité d’échange nouvelle au moyen du partage d’une unité monétaire n’était pas en train de créer seulement un commun monétaire, mais elle ouvrait la voie à un véritable statut de monnaie publique inconnu à ce jour et dont le critère d’appréciation majeur réside dans son usufruit synchronique et universel ayant pour effet de produire une nouvelle partition générale de la valeur. Dans cette perspective, j’ai compris que ce réseau social de partage de la valeur pourrait intéresser des administrations publiques et des collectivités territoriales souhaitant produire et échanger en synergie en se libérant des contraintes budgétaires et du poison de la dette. Il pourrait également intéresser des banques coopératives qui disposent déjà de nombreux instruments et tableaux de bord et à qui il suffirait de rajouter des modules de gestion logarithmique et de traitement infinitésimal des unités de compte qui sont les seuls instruments manquants pour implémenter de nouvelles pratiques de partage de la valeur à grande échelle.
Dans tous les cas, la transformation opérationnelle de l’idée de l’échange dans l’unité monétaire passe par un réseau social donnant à chaque participant un tableau de bord lui permettant de visualiser les rapports de valeurs qu’il souhaite produire par la multiplication inversée de l’unité monétaire commune. En effet, il n’y a qu’un tableau de bord qui permettrait aux personnes de gérer leurs opérations de règlement en monnaie infinitésimale en percevant en permanence leur correspondance avec les valeurs du marché dont elles sont seulement un double inversé.
En terme de training, je vois la possibilité pour des groupes de personnes plus ou moins importants de placer au milieu d’eux une unité de compte qui leur permettra de développer des rapports de réciprocité et de programmer des activités ensemble. On pourrait par exemple imaginer de produire des rapports de réciprocités basés sur 3 modes d’évaluations distincts : celui des activités ayant une valeur en soi et pour soi (réflexivité) où l’évaluation ne peut pas faire l’objet d’une évaluation mercantile comparative ; celui des activités ayant une valeur pour l’autre (commutativité) où l’évaluation repose sur des comparaisons et des substitutions propres aux échanges mercantiles, et enfin celui des activités ayant une valeur pour les tiers et pour l’ensemble de la communauté (transitivité) où l’évaluation repose sur une transmission.
Il sera intéressant de faire des tests sur des groupes de 3 ou 4 personnes pour voir quelle dynamique d’échange de réciprocités l’utilisation de l’unité de compte logarithmique pourrait susciter dans des petits groupes.
Comment cet échange de réciprocités fonctionne-t-il concrètement ? On peut le décrire en distinguant 2 étapes assez simples :
A- Chaque agent génère son propre champ monétaire, non par rapport à des biens ou des services qu’il voudrait évaluer en vue de les vendre, mais par rapport à ses besoins réels. Sachant que nous sommes dans une multiplication inversée, les besoins réels ont une valeur inverse et infinitésimale qui est équivalente à celle du champ monétaire. Cette opération première est déterminante car elle permet de corréler la génération du champ monétaire directement aux besoins et pas à une offre commerciale de biens ou de services. Cette opération première est différenciante car elle est totalement inconnue du capitalisme qui réserve les opérations de monétisation aux seuls actifs financiers. Cette opération s’explique par le fait que nous ne sommes plus dans des transactions commerciales de biens et de services solvables mais dans un investissement basé sur des valeurs que chacun souhaite promouvoir dans un projet. Dans cette perspective, on peut affirmer que chaque agent se sert de son unité de compte pivot afin de projeter une valeur monétaire au travers de son champ afin de disposer des moyens financiers qui vont lui permettre de réaliser le projet de vie qui répond à ses besoins réels — besoins qui peuvent autant être d’ordre personnels que collectifs.
Comme on le voit ici le besoin est premier. Cela diffère considérablement du fonctionnement du système marchand dans lequel chacun doit procéder à l’évaluation de ses biens et services, puis les vendre contre de l’argent pour espérer disposer des moyens financiers qui potentiellement vont permettre de satisfaire à certains besoins qui viennent donc en dernière position dans la longue chaîne des opérations à réaliser. On pourrait résumer cela en disant que l’économie marchande est au service de la rentabilité et de la solvabilité mais pas de la satisfaction des besoins.
B-. Plusieurs agents génèrent corrélativement des champs monétaires superposés à partir de l’unité monétaire de base. Ainsi on observe que l’espace d’échange n’est pas seulement la résultante de l’intersection d’ensembles patrimoniaux préexistants, mais il est un nouveau champ monétaire collectif formé à partir de l’intersection des champs monétaires individuels issus de l’unité monétaire de base. C’est pourrait-on dire une pratique collective de la génération des champs monétaires à partir d’une même unité monétaire de base par laquelle les personnes découvrent de nouvelles facultés d’échanges et font l’expérience de la possibilité d’un rapport de réciprocité. La possibilité nouvelle de définir librement et intérieurement les rapports de valeur qui fixent les termes des échanges permet aux agents de développer un échange hautement personnalisé capable de refléter leurs intentions mutuelles sans être aliéné par les exigences du marché et par son système de prix imposés et largement manipulés. Dans tous les cas, les personnes pourront avoir recours aux ordres de grandeur monétaire issus de l’unité de base soit pour répondre à des besoins, soit pour produire des capacités qui permettront de répondre à des besoins. C’est parce qu’ils placent cette unité monétaire commune au centre de leurs discussions et de leurs processus de production, d’échange et d’ajustement des rapports de valeurs que les agents créent les conditions d’une réciprocité généralisée.
Dans ce nouveau système, les échanges sont structurés autour de rapports de valeur équilibrés, qui prennent en compte une variété de facteurs tels que les coûts de production, les prix, les besoins, et les capacités. Les transactions peuvent être multilatérales et hautement personnalisées, maximisant l’utilité et la satisfaction des participants. Dans le système mercantile, les échanges sont souvent bilatéraux et standardisés, avec une structure rigide basée sur des prix de marché absolus et des quantités inégales, ce qui peut limiter la réussite des transactions.
La notion de rapport de valeur joue comme on le voit un rôle central car elle élimine l’illusion économique selon laquelle l’échange ne reposerait que sur des quantités différentes. Or dans le domaine économique, la valeur se définit toujours comme un rapport, et c’est en fonction de ce rapport fondateur que l’on produit les mesures monétaires.
On peut affirmer que les échanges basés sur les rapports de valeur offrent une plus grande diversité transactionnelle que les échanges purement mercantiles, qui sont souvent axés sur la recherche de profit. Dans un système basé sur les rapports de valeur, les échanges se concentrent sur la valeur réelle et perçue des biens et services. Cela permet une évaluation plus fine et plus variée de ce que chaque participant apporte à l’échange, favorisant une plus grande diversité dans les types de biens et services échangés. Les rapports de valeur permettent des transactions hautement personnalisées. Les participants peuvent négocier et ajuster les rapports en fonction de leurs besoins spécifiques et des circonstances particulières, conduisant à des arrangements uniques et adaptés, contrairement aux transactions mercantiles standardisées. Les échanges peuvent facilement devenir multilatéraux, impliquant plusieurs parties et créant des réseaux complexes d’échanges où les besoins de chaque participant sont satisfaits de manière optimale. Cela dépasse les simples transactions bilatérales à portée sociale limitée typiques des échanges mercantiles.
L’absence de pression pour maximiser les profits libère les participants pour explorer des modèles d’échange innovants, tels que les coopératives, les systèmes de partage, les abonnements et les échanges de services personnalisés. Ces modèles peuvent être mieux adaptés aux besoins spécifiques des communautés et des individus. Les rapports de valeur favorisent des échanges basés sur la coopération plutôt que sur la compétition. Les participants sont incités à collaborer pour créer de la valeur commune, ce qui peut donner lieu à des formes de transactions plus diversifiées et bénéfiques pour tous les participants. La diversité transactionnelle est augmentée par la possibilité de mesurer la valeur de différentes manières, en fonction de critères tels que l’utilité, la rareté, la qualité, le temps, et même des considérations environnementales ou sociales. Cela permet des transactions qui intègrent des dimensions multiples et complexes mais vitales pour la vie humaine. Un système transparent et équitable encourage la participation d’un plus grand nombre de personnes et d’organisations, y compris celles qui pourraient être exclues des marchés traditionnels. Cela ouvre la porte à une plus grande variété de biens et services et à des échanges plus inclusifs et enrichissants.
Les échanges basés sur les rapports de valeur peuvent stimuler l’innovation, car en disposant d’une capacité d’échange à la fois scalable et unitaire, les participants sont incités à améliorer la valeur de ce qu’ils partagent pour que la synergie soit optimale. Cela conduit logiquement à une diversification des produits et services proposés, avec une attention particulière à l’optimisation de la valeur pour tous les participants. Les rapports de valeur permettent de mieux répondre à des besoins complexes et variés. Par exemple, des échanges peuvent être structurés pour inclure des éléments de temps, de savoir-faire, de ressources partagées, et d’autres dimensions qui sont difficiles à intégrer dans des transactions mercantiles standardisées. Cette faculté provient du constat assez simple mais fondamental qu’un raisonnement par la valeur et par les coûts permet de tout évaluer tandis qu’un raisonnement par la rentabilité et le profit se cantonne aux biens et services solvables. Les systèmes basés sur la réputation et la confiance ajoutent une couche supplémentaire de diversité et de dimension humaine, car les échanges peuvent être influencés par la réputation et la fiabilité des participants. Cela peut créer des opportunités pour des échanges plus nuancés et basés sur la confiance mutuelle dans laquelle le crédit d’une personne est synonyme de confiance.
Les échanges basés sur les rapports de valeur diversifient et qualifient les transactions en offrant une flexibilité accrue, en favorisant la coopération, en permettant des mesures de valeur multiples et en stimulant l’innovation. Ces caractéristiques permettent des échanges plus riches et plus adaptés aux besoins réels des participants, dépassant largement les limitations des critères de solvabilité et de rentabilité du marché.
Sachant que ce marché des réciprocités repose sur une évaluation quantitative de la valeur des biens et des services, et que le but n’est plus d’accumuler de l’argent en échange de biens, doit-on en conclure que ce système mènerait inévitablement à un troc, ce qui serait assez limitatif ?
Comme nous allons le voir ci-dessous, un tel système d’échange ne se réduirait pas nécessairement à un simple système de troc. En fait, l’utilisation d’une unité monétaire commune pour évaluer et équilibrer les rapports de valeur pourrait donner naissance à de nouvelles formes de transactions plus complexes, plus flexibles et potentiellement plus équitables que celles que nous connaissons aujourd’hui. Cette diversification des modes d’échanges va selon nous dans le sens de la réciprocité car elle libère les personnes des approches anonymes et impersonnelles qui sont celles du capitalisme financier. Voici quelques types de transactions et mécanismes innovants qui pourraient émerger :
Système d’investissement mutualisé
Les participants pourraient projeter une valeur monétaire leur permettant d’organiser le partage des travaux et des produits dans le cadre de certains projets tels que ceux de la promotion immobilière participative. Par cette anticipation, ils procèderaient à de véritables investissements qui ne seraient plus seulement basés sur la recherche d’un profit et une absence de participation, mais sur la capacité à travailler à la fois pour les autres et pour soi-même au sein de collectifs auto organisés autour de projets qui répondent à leurs besoins et génèrent de la valeur.
Systèmes de crédit et de débit mutuels
Les participants pourraient établir des comptes de crédit et de débit basés sur des rapports de valeur, permettant des échanges différés. Par exemple, un individu pourrait recevoir un bien ou un service aujourd’hui et offrir un autre bien ou service de valeur équivalente à une date ultérieure, en enregistrant cette promesse de valeur dans un système de comptabilité mutuelle. Il y aurait donc matière à créer une économie de l’engagement temporel différé dans laquelle la comptabilité temporelle pourrait être courte, moyenne ou longue, allant jusqu’à des actions intergénérationnelles.
Marchés basés sur l’utilité
Les marchés pourraient se structurer autour de la satisfaction des besoins spécifiques plutôt que de l’accumulation monétaire illimitée. Par exemple, des plateformes pourraient émerger où les participants font un vote de préférence afin de définir une fonction sociale d’utilité collective par laquelle ils fixent des domaines prioritaires. En partant des résultats de ce vote, la collectivité oriente le champ de l’activité collective et détermine une échelle de valeur basée sur la fonction d’utilité qui a été décidée collectivement. Sur cette base, on a une autre plate-forme dans laquelle les participants publient leurs besoins et offres, et où les rapports de valeur sont automatiquement calculés pour privilégier les échanges optimaux en termes d’utilité pour chaque participant mais également pour la collectivité.
Marchés basés sur l’équité
Alors que le marché basé sur l’utilité avait pour but de répondre aux besoins non satisfaits les plus immédiats, le marché basé sur l’équité se positionne pour sa part dans un temps long capable de contribuer à ce que nous appelons une équité intergénérationnelle. Tout ce que nous décidons d’entreprendre dans la perspective du temps très long se rattache à la question de l’équité intergénérationnelle. L’objectif est de réfléchir à ce que nous voulons transmettre aux générations du futur mais également du passé. Un tel marché vise donc autant la rénovation du patrimoine et la réparation de certaines fautes historiques que réparation et la préservation des grands écosystèmes naturels et culturels qui apporteront de la valeur le plus durablement possible vers des générations passées et futures.
Marchés du travail
Les marchés pourraient également se structurer autour de la réalisation de capacités spécifiques et d’une monnaie conçue et modélisée comme une énergie libre. Rappelons qu’en physique, une énergie libre est une fonction de partition qui se mesure par l’énergie disponible dans un système pour effectuer un travail utile. Par conséquent, une énergie non libre se mesure à une faible fonction de partition qui conduit à l’absence d’énergie disponible (soit en raison de destructions, soit en raison d’une privatisation) pour permettre à chacun d’effectuer un travail utile. Le marché du travail a pour objectif maximiser la fonction de partition afin de produire le maximum d’énergie libre au travers du développement de capacités naturelles et sociales, biologiques et techniques accessibles à tous. L’utilisation partagée de ces capacités est équivalente à la mise à disposition d’une force de travail pour tous les agents et s’apparente à une production d’actifs.
Échanges multilatéraux
Plutôt que des échanges bilatéraux simples, des transactions multilatérales pourraient devenir courantes. Par exemple, si A a besoin de quelque chose de B, B de C, et C de A, ils pourraient organiser une transaction où chaque partie reçoit ce dont elle a besoin en fonction des rapports de valeur établis entre les trois parties. Cela maximise l’efficacité des échanges car elle permet de créer des transactions basées sur la structure sociale.
Systèmes de points de confiance et réputation
Pour renforcer la transparence et l’équité, des systèmes de points de confiance et de réputation pourraient être mis en place. Les participants gagnent des points de confiance en effectuant des échanges équitables et en respectant leurs engagements, ce qui leur permet de participer à des transactions de plus grande valeur ou d’accéder à des offres spéciales. Un tel système de récompense pourrait par exemple être mis en place afin d’inciter la société civile de s’engager afin de participer activement à la réalisation des différents objectifs de développement durable.
Groupes d’échange et coopératives
Les participants pourraient former des groupes d’échange ou des coopératives où les biens et services sont échangés en fonction des besoins collectifs et des capacités individuelles. Cela pourrait inclure des communautés locales partageant des ressources ou des compétences spécifiques, avec une comptabilité des contributions et des bénéfices basée sur des rapports de valeur. Dans tous les cas, le fait d’utiliser une unité de base commune confèrerait aux structures coopératives de nouveaux modes de financement en accord avec leurs principes de cohésion et d’unité.
Échanges basés sur des algorithmes
Des algorithmes avancés pourraient être utilisés pour aider les personnes à calculer et optimiser les rapports de valeur et les ordres de grandeurs entre de nombreux participants qui utilisent la même base monétaire. Cela faciliterait les échanges complexes et multi-niveaux qui maximisent l’utilité collective. Ces algorithmes pourraient prendre en compte les préférences individuelles, les disponibilités et les besoins pour proposer les meilleures correspondances possibles et aider la prise de décision.
Utilisation de jetons ou de bons échangeables
Les participants pourraient utiliser des jetons ou des bons représentant des rapports de valeur spécifiques pour simplifier les échanges. Ces jetons ou bons comparables à des NFT pourraient être échangés facilement et utilisés pour acquérir des biens et services au sein du réseau, en corrélant les évaluations au système de valeur qui a été choisi en amont.
Systèmes de partage et d’abonnement
Les systèmes de partage et d’abonnement pourraient devenir plus courants, où les participants accèdent à des biens et services en fonction de leurs besoins plutôt que de les posséder individuellement. Par exemple, des services de transport, d’outils ou d’équipements pourraient être partagés au sein d’une communauté en utilisant des rapports de valeur pour gérer l’accès et l’utilisation équitable. Il s’agirait d’un processus de dématérialisation basée sur une approche fonctionnelle des biens et services qui maximise leur accessibilité et les niveaux de satisfaction.
Marchés de services personnalisés
Les échanges pourraient inclure des services hautement personnalisés, adaptés aux besoins individuels. Par exemple, un enseignant pourrait offrir des leçons sur mesure en échange de produits alimentaires cultivés par un agriculteur, avec des rapports de valeur ajustés en fonction de la spécificité et de la qualité du service.
Transactions basées sur des objectifs communautaires
Les participants pourraient contribuer à des projets ou objectifs communautaires en échange de biens et services, avec des rapports de valeur définis par l’impact ou la contribution de chaque participant. Cela favoriserait des échanges qui bénéficient non seulement aux individus mais aussi à la communauté dans son ensemble.